Propulser une reprise vigoureuse
Un plan de croissance économique pour le Canada
Le défi
Pour les Canadiens et Canadiennes, la pandémie de COVID-19 est une situation d’urgence économique et sanitaire qui ne survient qu’une fois dans une vie et qui a exacerbé les faiblesses structurelles de notre économie. Les décideurs politiques sont donc confrontés à un double défi d’une ampleur considérable : ils doivent poser les bases d’une reprise sûre et durable tout en mettant en place un plan à long terme pour la croissance économique et la prospérité.
La priorité immédiate des gouvernements est d’endiguer la propagation du virus. Un nouveau confinement de l’ampleur de celui observé au printemps 2020 serait catastrophique pour les travailleurs, les familles, les entreprises et la société dans son ensemble. À terme, les gouvernements manqueraient de marge de manoeuvre budgétaire pour fournir un soutien au revenu et une stimulation économique.
Au cours des derniers mois, le Conseil canadien des affaires a émis une série de recommandations pour faire face à la crise sanitaire et économique. Entre autres priorités, nous avons souligné le besoin de renforcer la coordination et la cohérence entre les niveaux de gouvernement dans la lutte contre le virus, en nous appuyant sur les meilleures preuves scientifiques disponibles. Nous avons demandé que les tests et la recherche des contacts soient généralisés, systématiques et rapides, que les lignes directrices en matière de la santé publique soient mieux définies et que ces règles soient respectées afin de garder le virus sous contrôle. Nous avons exhorté les organismes de santé publique à faire preuve de plus de transparence quant aux lieux où se produisent les épidémies et aux causes de celles-ci. Nous avons souligné à maintes reprises le besoin d’une aide ciblée pour les employeurs et les travailleurs des secteurs les plus durement touchés, notamment le tourisme et l’hôtellerie.
Il reste encore beaucoup à faire dans chacun de ces domaines. Toutefois, l’objectif du présent document est d’aller au-delà de la pandémie et d’examiner certains des défis structurels sous-jacents auxquels est confrontée l’économie canadienne, et d’aider à structurer un débat plus large sur les politiques nécessaires pour surmonter ces défis. Les dommages économiques irréversibles de la COVID-19 seront importants, tant au niveau mondial que national. L’endettement combiné des gouvernements fédéral et provinciaux, des ménages et des entreprises sera beaucoup plus élevé, tout comme le taux de chômage, par rapport aux niveaux de 2019.
Au cours des prochains mois, nous allons nous adresser à un grand nombre d’intervenants et les inviter à nous faire part de leurs idées, stratégies et solutions. Le point de départ de ces discussions est la reconnaissance du fait que le Canada fait face à d’importantes perturbations économiques. Le plus évident est peut-être le vieillissement de la population de notre pays. Chaque année, les tendances démographiques resserrent les marchés du travail et les réserves de talents, ce qui a tendance à réduire les recettes fiscales et à augmenter la demande en services sociaux et en santé. Ajoutons à cela le faible bilan du Canada en matière productivité de la main d’oeuvre, un problème qui ne date pas d’hier, les obstacles structurels à la croissance des entreprises mondiales basées au Canada et les obstacles réglementaires qui vont bien au-delà des pipelines.
En tant qu’économie de taille moyenne fortement dépendante de ses exportations, le Canada doit faire face à la montée du protectionnisme, à l’érosion de l’ordre international fondé sur des règles multilatérales et aux changements géopolitiques qui nous ont de plus en plus isolés sur la scène mondiale. Nous devons également relever, avec le reste du monde, le défi multidimensionnel des changements climatiques mondiaux, notamment la nécessité de disposer d’infrastructures plus résistantes au climat et d’investissements financiers importants pour soutenir la transition vers une société à faibles émissions de carbone.
Enfin, et surtout, nous devons reconnaître qu’une part croissante de l’activité économique ne repose pas sur des actifs matériels , mais bien sur des actifs immatériels tels que la propriété intellectuelle, les logiciels, les données et les marques, domaines dans lesquels le Canada accuse généralement du retard par rapport à ses pairs. Plus de 90 % de la valeur de l’indice boursier S&P 500 réside désormais dans ces biens immatériels. La boîte à outils traditionnelle de la politique économique du Canada doit être mise à jour si nous espérons voir naître des entreprises nationales innovantes, capables d’être compétitives à l’échelle mondiale dans cette ère nouvelle.
Au début de la pandémie de COVID-19, nous avons vu comment une collaboration étroite entre les secteurs public et privé du Canada pouvait permettre de surmonter des problèmes complexes et urgents. Annoncé le 20 mars 2020, le « Plan canadien de mobilisation du secteur industriel » du gouvernement fédéral a mis à profit la force de la base industrielle du pays et l’ingéniosité des entreprises canadiennes pour répondre au besoin soudain de grandes quantités de fournitures essentielles pour la santé et la sécurité, telles que des équipements de protection individuelle, des produits d’assainissement et des appareils de diagnostic.
Selon nous, là encore, tout le monde devra mettre l’épaule à la roue pour relever les défis économiques à long terme auxquels le Canada est confronté. La nécessité de remédier au sous-rendement du Canada en matière de productivité est au coeur de ces défis. À long terme, le niveau de productivité est « le » facteur qui détermine le niveau de vie d’un pays. Depuis des décennies, les taux de productivité du Canada sont inférieurs à ceux de nos pairs, ce qui se traduit par une baisse des revenus et du pouvoir d’achat des ménages.
Comme l’a récemment affirmé David Dodge, ancien gouverneur de la Banque du Canada, « à long terme, le revenu réel des Canadiens et les programmes publics qu’ils chérissent dépendent de la valeur des biens et services (PIB) que les travailleurs et les entreprises du Canada produisent. On ne peut pas manger ce que l’on ne produit pas. Et la valeur de ce que nous produisons en tant que pays est inférieure à ce que nous consommons1. »
Un plan pour créer des emplois et développer notre économie
Les choix que nous faisons aujourd’hui auront des conséquences importantes et durables pour les générations à venir. Ainsi, dans l’intérêt des générations futures, nous devons focaliser nos efforts sur l’accroissement de notre capacité économique tout en relevant les défis immédiats et à long terme que posent les changements climatiques. Nous devons créer un environnement économique dans lequel les entreprises peuvent prospérer et créer de bons emplois, et dans lequel tous les Canadiens peuvent atteindre leur plein potentiel.
Pour accroître la capacité de production du Canada, nous devons tirer parti du capital humain, physique et intellectuel du pays. Une productivité accrue se traduit par une croissance économique et de meilleurs revenus, lesquels rehaussent le niveau de vie, assurent la viabilité des programmes sociaux et une plus grande mobilité sociale.
Si le Canada, avec sa population relativement restreinte, tient à rester compétitif au niveau mondial, il doit vendre plus de biens au reste du monde qu’il n’en consomme. Ce n’est ni un point théorique ni un sujet qui concerne uniquement les chefs d’entreprise ou les actionnaires. L’augmentation des revenus est une mesure économique fondamentale pour le bien-être des ménages canadiens, qu’ils vivent à Lethbridge, Gander ou Baie-Comeau. La productivité est le déterminant qui fait toute la différence entre croissance et stagnation économiques. Elle est le fondement de la réussite des collectivités et des nations.
Un plan de croissance économique crédible repose sur trois grands piliers : les gens, le capital et les idées.
Les gens : Le fondement de notre succès économique réside dans notre capital humain. Nous devons le développer et le renforcer.
Le capital : Nous avons besoin d’un environnement favorable qui attire les investissements, favorise la création de nouvelles entreprises et industries, et permet aux entreprises existantes de croître et de générer de bons emplois.
Les idées : Il est essentiel de générer de nouvelles idées et de les mettre en pratique pour assurer la concurrence et la croissance. En cette période de transition vers une économie où la création de richesse provient de plus en plus d’actifs immatériels tels que la propriété intellectuelle et les données, il est essentiel que notre cadre économique soit doté d’une boîte à outils d’innovation moderne.
Six obstacles majeurs
- Les Canadiens vieillissent. La partie de la population âgée de 65 ans ou plus était de 14 % en 2010, mais elle devrait atteindre 20 % d’ici 20242. Le vieillissement de la population affaiblit la croissance du PIB et fait en sorte qu’il est plus difficile pour les employeurs de trouver les personnes dont ils ont besoin pour se développer et croître. Ce phénomène exerce également une pression à la hausse sur les dépenses publiques, notamment pour les soins de santé et les régimes de retraite.
- Nous importons plus de biens et de services que nous n’en produisons. Au cours de la dernière décennie, les déficits courants de notre pays avec le reste du monde ont oscillé entre deux et trois pour cent du PIB. Les exportations non énergétiques sont essentiellement restées stables et la part des exportations canadiennes à destination des économies émergentes est parmi les plus faibles des pays du G7 (Énoncé économique de l’automne 2018).
- Le Canada a peine à faire croître des entreprises ayant la taille nécessaire pour être concurrentielles à l’échelle mondiale. En 2020, seulement 13 entreprises canadiennes figuraient dans le classement du Fortune Global 500, un classement annuel des 500 premières entreprises mondiales en termes de chiffre d’affaires.
- Ces dernières années, les investissements des entreprises au Canada ont été inférieurs à ceux des autres grandes économies avancées. Selon la Mise à jour économique et financière 2019 du gouvernement fédéral, les investissements réels des entreprises ont augmenté entre 2015 et 2019 aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Allemagne. Au Canada, ils ont fortement chuté et ne sont pas près de se relever3.
- Un rapport Brookings4 de 2018 a révélé que les industries de pointe du Canada, y compris des secteurs aussi divers que la production automobile et aérospatiale, les technologies de l’information et l’extraction du pétrole et du gaz, sont beaucoup moins productives que leurs homologues américaines : « En 1996, la différence de productivité entre le travailleur canadien moyen dans une zone métropolitaine et le travailleur américain moyen dans une zone métropolitaine était d’environ 17 %. En 2015, cet écart était passé à 100 % ».
- Avant la COVID-19, le ratio de la dette fédérale canadienne par rapport au PIB était de 30 %; aujourd’hui il dépasse les 50 %, ce qui exercera d’énormes pressions sur la capacité fiscale du gouvernement pour les années à venir. Comme l’a déclaré l’ancien vicegouverneur de la Banque du Canada, Paul Jenkins, « la source de financement la plus durable est une croissance économique soutenue, non pas une dépendance à de faibles taux d’intérêt5 ».
2 https://www150.statcan.gc.ca/n1/daily-quotidien/190930/cg-a003-fra.htm
3 https://www.budget.gc.ca/efu-meb/2019/docs/statement-enonce/chap01-fr.html#s5
4 https://www.brookings.edu/wp-content/uploads/2018/06/Canadas-Advanced-Industries_18-06-05_FINAL2.pdf
5 https://www.cdhowe.org/intelligence-memos/paul-jenkins-%E2%80%93-long-%E2%80%A6-and-short-finding-equilibrium
Les gens
L’atout le plus important du Canada est son capital humain. Nous avons l’un des meilleurs taux de réussite dans l’enseignement supérieur du G7 et un système d’immigration qui s’est avéré l’un des plus performants au monde. Nous devons miser doublement sur ces atouts.
Comme l’a souligné Paul Romer, lauréat du prix Nobel de l’économie, « ma première recommandation est d’investir dans les gens6». Une stratégie à long terme pour le développement du capital humain est essentielle pour renforcer la résilience de nos marchés du travail et accroître la capacité de production du pays. Investir dans le capital humain et attirer de nouveaux arrivants doués sur notre territoire sont parmi les stratégies les plus avisées pour faire face aux forces incessantes de perturbation, de bouleversement et de changement fondé sur les compétences.
Les décideurs politiques doivent donc travailler avec les provinces pour aider les Canadiens et Canadiennes à acquérir les compétences dont ils ont besoin, attirer des immigrants hautement qualifiés et accroître la participation à la population active, en particulier au sein des communautés défavorisées. La concurrence mondiale pour les talents est intense et le deviendra probablement encore plus, les entreprises et les économies rivalisant afin d’avoir le plus gros bout du bâton dans ce monde de post-pandémie. Le Canada doit se doter d’une stratégie ambitieuse axée sur les gens.
Développer un effectif plus agile
La crise de la COVID-19 a accéléré une transition qui était déjà amorcée dans le marché du travail canadien. Une évolution technologique rapide, un contexte incertain et instable pour les exportations, la montée de l’économie à la pige et les changements démographiques continuels se sont combinés pour créer une nouvelle réalité pour les employeurs canadiens.
Disposer d’un effectif agile et résilient, qui soit dotée de la bonne combinaison de compétences pour faire face à l’évolution des exigences techniques et créatives du marché mondial, exige un investissement et une adaptation continus de la part des entreprises canadiennes. Cela nécessite également des partenariats solides avec le gouvernement et les établissements d’enseignement supérieur.
L’explosion du nombre d’emplois dans le domaine des technologies et de l’informatique est un exemple probant de l’évolution du marché du travail. Au cours de la dernière décennie, le nombre d’emplois dans l’édition de logiciels au Canada a augmenté de 61 %, pour atteindre 50 000, tandis que le nombre d’emplois dans la conception de systèmes informatiques a augmenté de 66 %, pour atteindre 258 000. Il n’est donc pas étonnant que certains dirigeants d’entreprises et d’établissements d’enseignement supérieur aient demandé que l’éducation, les compétences et la formation soient revisitées; ils ont notamment insisté7 sur le besoin de développer la pensée circulatoire et les compétences numériques, et de trouver de nouveaux moyens de mettre les enseignants en contact avec les praticiens.
Dans le cadre du système fédéral canadien, l’éducation relève exclusivement des provinces, mais Ottawa peut faire beaucoup pour aider les Canadiens et Canadiennes à obtenir l’éducation et la formation dont ils ont besoin. Les efforts que le gouvernement fédéral déploie actuellement dans ce domaine s’appuient principalement sur la partie II de la Loi sur l’assurance-emploi (AE) et visent à aider les chômeurs à se préparer à l’emploi, à en trouver un et à le conserver. Il en résulte malheureusement un ensemble disparate et insuffisant d’initiatives annoncées dans les budgets fédéraux successifs, plutôt qu’une stratégie globale qui tienne compte de la nature évolutive du marché du travail. Le besoin de réforme est encore plus criant maintenant que la pandémie a déplacé des millions de travailleurs canadiens. Certains de ces emplois reviendront une fois que la COVID-19 ne sera plus une menace, mais beaucoup d’autres sont probablement disparus à jamais.
À notre avis, le gouvernement fédéral devrait collaborer avec les gouvernements provinciaux et territoriaux pour élaborer un programme exhaustif en matière de compétences qui aiderait les travailleurs déplacés à s’orienter différemment, élargirait les possibilités d’apprentissage intégré au travail pour les étudiants et les diplômés de l’enseignement supérieur (voir ci-dessous) et aiderait les Canadiens à se perfectionner continuellement afin de rester compétents et d’améliorer leur employabilité à mesure que la technologie et la société évoluent. Les éléments ce programme pourront être précisés plus tard, mais ils devraient inclure ce qui suit :
- Des formations et des stages rémunérés élargis pour aider les chômeurs canadiens à s’orienter vers des débouchés bien rémunérés et plus stables dans l’économie numérique. Palette, un projet pilote dirigé par le Dr Arvind Gupta de l’Université de Toronto, est un exemple prometteur de ce qui pourrait fonctionner. Palette est une plateforme de perfectionnement qui met en relation les travailleurs des industries en difficulté avec les entreprises à croissance rapide qui ont du mal à combler les postes très en demande.
- Le développement du leadership pour l’économie numérique. Plus l’économie évolue et que de nouvelles industries voient le jour, plus le besoin de nouvelles compétences en leadership devient criant. Cela inclut des programmes de formation et de mentorat en gestion de l’innovation ainsi que des échanges et des stages pour les cadres, autant les néophytes que ceux rendus en milieu de carrière. Qu’ils travaillent pour des entreprises établies ou en démarrage, les gestionnaires ont besoin d’occasions d’apprendre auprès d’entreprises canadiennes et internationales qui ont su gérer efficacement l’innovation et la croissance.
- Une révision vaste et approfondie du système d’assurance-emploi. Lorsque l’assuranceemploi a été introduite en 1940, elle était censée être une responsabilité conjointe des employeurs, des travailleurs et du gouvernement. Aujourd’hui, « il n’existe pratiquement aucun mécanisme pour faciliter et garantir la participation des entreprises et des travailleurs », a écrit feu Donna Wood, une des plus grandes expertes canadiennes en matière d’assurance-emploi, dans un document de 2017 pour le Centre Mowat. Et ce, « en dépit du fait que la quasi-totalité des coûts encourus […] sont payés par les cotisations d’assurance sociale obligatoires prélevées auprès de leurs électeurs8». Pour mieux répondre à l’évolution des demandes du marché du travail, le système d’assurance-emploi doit mettre davantage l’accent sur la formation axée sur les compétences et l’adaptation au marché du travail. Actuellement, le Canada est l’un des pays industrialisés qui dépensent le moins pour les programmes d’adaptation au marché du travail9.
Aider les jeunes Canadiens et Canadiennes à se bâtir une carrière enrichissante
S’il était difficile avant la pandémie pour les jeunes de réussir la transition de l’école vers le travail, la COVID-19 a rendu la tâche nettement plus difficile. La bonne nouvelle est qu’une des solutions bénéficie déjà d’un large soutien. Les étudiants, les employeurs et les éducateurs de l’enseignement supérieur s’entendent pour dire qu’il faut davantage de possibilités d’apprentissage expérimental et d’intégration au travail, comme les formations d’apprenti, les programmes d’enseignement coopératif et les stages. En 2003, Mitacs, un organisme de recherche et de formation à but non lucratif basé à Vancouver, a lancé un programme de stages qui vise à trouver des emplois dans le secteur privé pour les diplômés en mathématiques et en sciences ayant un niveau d’études élevé. Quatre ans plus tard, le programme a été élargi pour inclure toutes les disciplines. Au fil des ans, Mitacs a soutenu plus de 10 000 stages de recherche, formé plus de 19 000 étudiants et participants postdoctoraux et soutenu plus de 1 300 collaborations internationales en recherche.
La Table ronde du milieu des affaires et de l’enseignement supérieur (TRMAES), que le Conseil canadien des affaires a lancée en 2015, réunit les dirigeants des plus grandes entreprises et des établissements d’enseignement postsecondaire du Canada afin de favoriser et de renforcer les possibilités de transition des jeunes vers le marché du travail. Il s’agit notamment de développer l’écosystème de l’apprentissage intégré au travail. Une de ses priorités actuelles est de trouver des moyens de mettre les étudiants en contact avec des entreprises qui font face à une myriade de défis liés à la COVID-19.
Alors que les décideurs politiques cherchent à élargir les programmes d’apprentissage intégré au travail, ils devront également se concentrer sur les étudiants qui préfèrent apprendre un métier et les jeunes pour lesquels un diplôme universitaire classique de quatre ans n’est pas le bon choix. La pénurie de main-d’oeuvre dans les métiers spécialisés représente un obstacle important à l’investissement et à l’activité économique dans de nombreuses régions du pays, et la demande devrait augmenter avec le départ à la retraite des baby-boomers. Là aussi nous devons élargir les possibilités de formation pour les nouveaux arrivants sur le marché du travail. Nous ne pouvons pas sacrifier une génération de talents à cause de l’hécatombe économique que la COVID-19 a suscitée.
Renforcer notre effectif et attirer le talent
Le système d’immigration du Canada est depuis longtemps une source de nouveaux arrivants très instruits et talentueux, ce qui profite simultanément au marché du travail du pays et à son écosystème d’innovation. Le Canada a atteint ce que peu d’autres pays ont atteint : un niveau de soutien public relativement élevé pour des niveaux d’immigration relativement élevés. Il s’agit d’un atout majeur pour le pays et, si le soutien public peut être maintenu, il deviendra un avantage encore plus grand quand le Canada cherchera à attirer des travailleurs qualifiés pour contrer les effets du vieillissement de la population. Par conséquent, nous devrions redoubler d’efforts pour d’attirer des immigrants qualifiés. Les restrictions aux frontières et aux voyages dues à la pandémie ont interrompu le flux de nouveaux résidents permanents en 2020, mais dès que les conditions le permettront, nous devrions augmenter considérablement les niveaux d’immigration par rapport aux niveaux actuels.
Lancée en 2017, la Stratégie en matière de compétences mondiales a été très efficace pour faciliter l’entrée d’immigrants possédant des compétences spécialisées et une expérience internationale. En 2019, la stratégie a permis d’accueillir 12 000 travailleurs hautement qualifiés au Canada, ce qui a été reconnu dans le monde entier comme une innovation politique majeure aidant les entreprises à croissance rapide à trouver les talents dont elles ont besoin pour réussir et se développer. De même, les entreprises innovantes ont grandement apprécié le volet des talents mondiaux, lequel leur permet de faire venir des talents hautement qualifiés du monde entier, et ce, en un temps record. Mais il reste encore beaucoup à faire pour attirer les meilleurs talents et tirer parti des effets de réseau de l’ambitieuse politique d’immigration du Canada.
Une autre priorité essentielle est d’attirer et de retenir les étudiants étrangers. Les universités, collèges et écoles polytechniques du Canada ont fait d’énormes progrès pour attirer des étudiants étrangers au cours de la dernière décennie. Leur nombre est passé d’environ 240 000 en 2011 à
495 000 en 2017. Cette vaste cohorte de talents représente une énorme opportunité pour le Canada. Il est tout à fait logique, en particulier dans les régions du pays où l’offre de main-d’oeuvre est en déclin, de retenir les jeunes diplômés qui ont une éducation canadienne, des relations et des liens avec le pays. Actuellement, dans le contexte de la COVID-19 et des restrictions sévères frappant l’entrée des étrangers, cela représente un défi considérable.
Accroître la participation à la population active
Parallèlement à l’immigration, l’autre moyen évident d’accroître la main-d’oeuvre canadienne est d’augmenter la participation à la population active, c’est-à-dire la part de la population adulte qui travaille ou cherche du travail. Dans l’ensemble, le Canada obtient de bons résultats au niveau international en termes de participation à la population active, et cela, en partie grâce à l’augmentation du nombre de femmes sur le marché du travail.
En 2019, un peu plus de 82 % des Canadiens âgés de 25 à 64 ans faisaient partie de la population active, un record absolu. Mais cette statistique masque certaines disparités sous-jacentes importantes10. En effet, les femmes et les Canadiens issus de milieux marginalisés ont généralement accès à moins de possibilités sur le marché du travail que les hommes. Le paradigme change lentement, mais les femmes consacrent plus de temps que les hommes aux tâches de soins, ce qui entraîne une ségrégation professionnelle et fait en sorte qu’elles sont plus nombreuses à risquer de se retrouver au chômage, notamment à cause de l’automatisation dans le secteur des services. En fait, une enquête réalisée par Randstad en 2019 a révélé que 30 % des femmes canadiennes qui travaillent s’attendent à perdre leur emploi dans les dix prochaines années en raison des progrès technologiques, tels que l’automatisation et l’intelligence artificielle.
Ces défis fondamentaux perdurent et doivent être surmontés, mais l’impact de COVID-19 sur les femmes qui sont sur le marché du travail a été dévastateur. En avril, la participation des femmes à la population active est tombée à son niveau le plus bas en trois décennies : 55,5 % contre 61,5 % un an plus tôt11. Bien que le taux d’emploi des femmes ait quelque peu remonté depuis, la pandémie a porté un coup sévère et potentiellement durable à plusieurs secteurs dans lesquels elles jouent un rôle disproportionné, notamment le commerce de détail, l’hébergement et les services de restauration. Cela ne fera qu’amplifier les disparités entre les sexes au sein de la population active et expose les femmes à un risque plus élevé de cessation d’emploi, auquel viendront s’ajouter de futures pénalités salariales.
La pandémie a également mis en lumière les problèmes d’équité en matière d’emploi auxquels sont confrontés les Canadiens issus de minorités ethniques et les peuples autochtones. Au début de la crise sanitaire, le taux de chômage des populations autochtones ― le segment du marché du travail canadien qui connaît la croissance la plus rapide ― était environ deux fois plus élevé que celui de l’ensemble de la population. En septembre 2020, il y avait un écart de cinq points de pourcentage à la suite de la reprise économique post-confinement pour les peuples autochtones par rapport aux Canadiens non autochtones12. Des taux plus faibles de scolarisation, des conditions de vie inférieures aux normes et des facteurs liés à la santé, notamment des taux disproportionnés de mortalité infantile et de suicide, font partie des nombreux problèmes complexes qui doivent être résolus afin d’accroître et de maintenir en poste la main-d’oeuvre autochtone du Canada.
Comme d’autres groupes marginalisés, ce n’est pas d’aujourd’hui que les personnes handicapées sont au chômage, sous employées ou moins bien payées en raison d’attitudes négatives et de présomptions erronées à l’égard de leurs compétences et de leurs capacités. Le taux d’emploi des personnes handicapées se situe à environ 65 % contre près de 82 % pour les personnes non handicapées, tandis que le taux de pauvreté est de 40 % plus élevé chez les personnes légèrement handicapées et de 200 % plus élevé chez les personnes lourdement handicapées13. Ces difficultés ont été aggravées par la pandémie : près de 36 % des personnes souffrant d’une affection ou d’un handicap de longue durée ont déclaré avoir perdu leur emploi de manière temporaire ou permanente depuis le début de la crise.
Au nom de l’équité et de la croissance économique, le Canada doit s’efforcer d’augmenter les taux de participation à la vie active de tous les segments de la population. Nous pouvons commencer par élargir l’accès à des services de garde d’enfants abordables, ce qui permet à un plus grand nombre de femmes de participer au marché du travail et constitue également une importante source d’emploi pour les femmes ― un moteur économique en soi. Des initiatives telles que le Programme pour l’entrepreneuriat des communautés noires, récemment lancé par le gouvernement fédéral, et l’engagement BlackNorth, mené par les entreprises, sont des exemples prometteurs du travail qu’il faudra faire pour mettre fin au racisme systémique et élargir les possibilités d’emploi des groupes marginalisés. Les gouvernements et les employeurs ne doivent pas perdre de vue la nécessité de créer des lieux de travail inclusifs et accessibles.
Le capital
L’économie canadienne ne peut pas croître et les Canadiens ne peuvent pas espérer améliorer leur niveau de vie sans un niveau d’investissement plus élevé du secteur privé. Les investissements des entreprises stimulent la productivité du travail, ce qui crée des emplois bien rémunérés et permet aux entreprises de survivre et de prospérer face à une concurrence internationale féroce. Selon Carolyn Wilkins, première sous-gouverneure de la Banque du Canada, « l’investissement rend les travailleurs plus productifs en augmentant le capital avec lequel ils doivent travailler. Vous pouvez déblayer votre entrée plus rapidement avec une souffleuse à neige qu’avec une pelle 14».
Malheureusement, la part des investissements des entreprises dans le PIB est plus faible au Canada que dans de nombreuses autres économies avancées ― un signe inquiétant du point de vue de la concurrence. En 2019, les chiffres de Statistique Canada et de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) montraient que les entreprises canadiennes investissaient environ 15 000 dollars par travailleur dans la machinerie, les immeubles, les infrastructures d’ingénierie et la propriété intellectuelle. En comparaison, les entreprises de l’OCDE investissaient
21 000 dollars par travailleur, tandis que les entreprises américaines investissaient pour leur part 26 000 dollars. La même année, le cabinet Deloitte a indiqué que les investissements bruts privés en capital fixe du Canada ne représentaient que de 10,8 % du PIB, soit le deuxième plus faible taux parmi les 12 pays pairs. Depuis 2008, les investissements des entreprises au Canada ont été constamment inférieurs à ceux de pays comme la Corée du Sud, l’Australie et la Suède15.
En modelant l’environnement des affaires, la politique publique joue un rôle essentiel pour aider à persuader les investisseurs nationaux et étrangers d’investir et de prendre des risques au Canada. Pour diverses raisons, cependant, le Canada a acquis la réputation d’être un pays où il est difficile et extrêmement long de faire démarrer de grands projets d’investissement. L’annulation de grands projets tels que le pipeline Energie Est, d’une valeur de 16 milliards de dollars, le projet Frontier de Teck, d’une valeur de 21 milliards de dollars, et le projet d’installation de gaz naturel liquide de Pacific NorthWest, d’une valeur de 36 milliards de dollars, réduira considérablement le volume des nouveaux investissements au Canada pendant de nombreuses années. Tout aussi préoccupante est la tendance croissante des entreprises ayant leur siège au Canada à choisir de prendre de l’expansion en dehors du pays, dans des régions qui offrent un environnement plus attrayant pour l’investissement privé. En fait, à la fin de 2019, la valeur marchande des investissements directs canadiens à l’étranger dépassait de 804 milliards de dollars les investissements directs étrangers au Canada16.
Bien que la liste des facteurs qui influent sur l’investissement des entreprises au Canada soit longue et complexe, le présent document porte principalement sur quatre domaines prioritaires qui pourraient débloquer les futures dépenses en capital : l’infrastructure, le commerce interprovincial, la réforme réglementaire et la compétitivité fiscale.
Une nouvelle approche en matière d’infrastructure
La plupart des discussions sur la nécessité de disposer d’infrastructures publiques de haute qualité au Canada ont tendance à porter sur les actifs classiques tels que les routes, les ponts, les installations de traitement des eaux, les centres communautaires et autres. Bien qu’importants et nécessaires, ces projets sont insuffisants pour assurer la compétitivité économique du pays dans l’économie du XXIe siècle.
Les investissements dans les infrastructures peuvent être parmi les leviers les plus puissants dont disposent les gouvernements pour atteindre leurs objectifs économiques à court et à long terme. Mais les investissements qui améliorent la courbe de croissance d’un pays ne sont pas le fruit du hasard. Ils nécessitent une planification minutieuse, un ensemble de priorités claires et un leadership politique. La pandémie de COVID-19 a plongé les gouvernements du Canada dans le rouge. Il est donc plus important que jamais de privilégier les projets qui moderniseront notre économie et nous rendront plus productifs comme pays, tels que la connectivité numérique, les grands réseaux de transport et de transit urbain, et les réseaux électriques à faible émission de carbone.
En tant que pays dépendant fortement du commerce avec le reste du monde, le Canada devrait également investir stratégiquement dans des infrastructures qui améliorent sa capacité à fournir des biens et des ressources aux marchés mondiaux. Pour ce faire, il faut améliorer l’infrastructure des transports vers les États-Unis, partout au pays, d’est en ouest, et dans les marchés mondiaux. Les incitations fiscales et une recapitalisation du Fonds national des corridors commerciaux, un programme couronné de succès, basé sur le mérite et maintenant entièrement financé, sont deux leviers importants qui peuvent débloquer les investissements des secteurs privé et public au profit d’infrastructures facilitant le commerce au Canada.
Une stratégie à deux volets qui encourage l’innovation et crée un environnement propice à de nouveaux investissements dans l’infrastructure numérique, laquelle est d’une importance cruciale pour le Canada, peut également favoriser des débouchés économiques et améliorer le niveau de vie. Par exemple, des investissements supplémentaires dans la technologie de la connectivité 5G et dans la connexion à large bande auraient des retombées considérables pour les Canadiens dans une panoplie de domaines allant de l’agriculture et des soins de santé à la gestion de l’énergie et aux transports.
Un autre défi pour le Canada consistera à mobiliser les capitaux privés nécessaires pour soutenir les nouveaux investissements. La Banque de l’infrastructure du Canada (BIC) a été créée en 2017 pour attirer des capitaux privés et de l’expertise en gestion de projets et faire progresser la stratégie du gouvernement fédéral en matière d’infrastructures. La banque a été dotée de 35 milliards de dollars et a reçu le mandat de travailler avec des coinvestisseurs privés et institutionnels pour soutenir des projets générateurs de revenus. Bien que seuls quelques accords aient été annoncés jusqu’à présent, rares sont ceux qui remettent en question la nécessité d’une telle agence pour catalyser des investissements importants.
Comme l’a écrit le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, en 2018, alors qu’il était doyen de la Rotman School de l’Université de Toronto, « la mesure opérationnelle la plus simple et la plus claire pour évaluer une infrastructure stratégique est sa capacité à générer de futurs flux de revenus. Si les entreprises et les ménages apprécient un service fourni par l’infrastructure, ils devraient être disposés à payer pour ce service, que ce soit le fret, l’électricité, la bande large, les tarifs d’eau, de transit ou les péages routiers. Ces flux de revenus constituent le test décisif de la valeur économique du projet. Les flux de revenus qui dépassent le coût de l’emprunt justifient le financement de la dette par le secteur public et sont également plus susceptibles d’attirer des capitaux privés17».
Une autre façon de générer les capitaux nécessaires à la construction de nouvelles infrastructures consiste à recycler les actifs, c’est-à-dire à vendre ou à louer des actifs publics existants au secteur privé et à utiliser le produit de la vente pour financer de nouveaux projets sans augmenter la dette publique. L’expérience récente de l’Australie en matière de recyclage des actifs offre un certain nombre de leçons utiles pour le Canada. En établissant un délai de deux ans pendant lequel les États et les territoires ont été encouragés à vendre leurs actifs, le gouvernement national australien a contribué à débloquer plus de 17 milliards de dollars pour le développement de nouvelles infrastructures, notamment de nouvelles infrastructures portuaires, routières et de transport de marchandises, ainsi que des systèmes légers sur rail18.
Renforcer le commerce interprovincial
Depuis des décennies, les économistes, les experts politiques et même de nombreux politiciens déplorent l’existence de barrières commerciales interprovinciales; pourtant, le rythme de leur démantèlement est au point mort. Il est temps d’arrêter de se traîner les pieds. Selon Statistique Canada, les restrictions au commerce et à la mobilité de la main-d’oeuvre entre les provinces ont un impact équivalent à un tarif de 6,9 %19. Les Canadiens ont protesté à juste titre lorsque le président Donald Trump a imposé des droits sur l’acier et l’aluminium canadiens, et pourtant, nous tolérons les restrictions importantes que nos propres gouvernements imposent à la circulation des biens et des services entre les provinces et les territoires. Cela est une pratique pernicieuse et autodestructrice.
La Banque du Canada a estimé que la suppression des barrières commerciales interprovinciales pourrait ajouter de 0,1 à 0,2 point de pourcentage à la production annuelle potentielle. Une étude récente de la Banque de Montréal a conclu que l’impact positif du libre-échange interprovincial « se cumulerait sur une décennie pour ajouter jusqu’à deux pour cent au PIB national, soit près de 50 milliards de dollars20». Cela représente plus du double des exportations annuelles du Canada vers la Chine, le deuxième partenaire commercial en importance de notre pays.
Les gouvernements pourraient rendre un immense service à l’économie canadienne en accélérant leurs efforts en vue d’ouvrir le marché canadien. Ce qui manque maintenant, c’est une voie, un processus et un calendrier clairs pour réformer le commerce interprovincial, le tout assorti de mesures de responsabilisation et d’objectifs précis.
Retirer les obstacles réglementaires
Une enquête menée auprès des membres du Conseil des affaires en janvier 2019 a révélé que l’inefficacité réglementaire était le problème le plus important qui pesait sur la compétitivité canadienne. Souvent, le problème provient de la duplication et de l’alignement inadéquat des processus réglementaires entre les gouvernements fédéral, provinciaux, territoriaux et municipaux. Au Canada, le fardeau de la réglementation reste inconnu et, par conséquent, ses impacts sur les entreprises ne sont pas comptabilisés.
Les réglementations trop compliquès et trop laborieuses sont plus qu’un inconvénient. Elles affectent directement la perception internationale du Canada en tant que lieu d’affaires et sapent les efforts permanents déployés par notre pays pour attirer les investissements étrangers directs. Elles augmentent les coûts pour les consommateurs, réduisent les possibilités d’emploi et limitent la capacité des entreprises à investir dans de nouvelles machineries et de nouveaux processus qui améliorent la productivité21.
Les exemples de grands projets qui ont connu de longs retards en raison de processus réglementaires redondants et inefficaces abondent. Le projet de terminal à conteneurs en eau profonde Laurentia de l’autorité portuaire de Québec et le projet de terminal Roberts Bank 2 à Delta, en Colombie-Britannique, sont tous deux à l’étude depuis près de dix ans. Chacun de ces projets stimulerait l’investissement, générerait de la croissance et élargirait les débouchés commerciaux des entreprises canadiennes à un moment où l’économie et les travailleurs canadiens ont besoin de toute l’aide possible, et où les gouvernements ont un besoin urgent de recettes fiscales qui découleraient d’une activité commerciale accrue.
Comme nous l’avons fait valoir dans le rapport de l’année dernière intitulé Un meilleur avenir pour les Canadiens, ce dont nous avons besoin, c’est un organisme de surveillance indépendant, capable de publier des rapports publics et dont le mandat législatif transcenderait le cycle politique. La mission de l’agence serait de mettre en lumière l’impact cumulatif de la réglementation sur l’économie nationale du Canada, ce qui aiderait les gouvernements à tous les niveaux à prioriser leurs efforts pour réformer et moderniser le système. Ces dernières années, l’Allemagne et le Danemark ont tous deux créé des institutions de surveillance similaires, améliorant la transparence et la responsabilité du système réglementaire tout en réduisant la charge réglementaire pesant sur les entreprises et les citoyens. La Colombie-Britannique, pour sa part, maintient un engagement politique « net zéro » qui oblige le gouvernement à maintenir le nombre total d’exigences réglementaires en dessous des niveaux de 2004 jusqu’en 2022.
Maintenir une fiscalité compétitive
Une politique fiscale peut être un outil puissant pour attirer et retenir les investissements et les talents. Si nous permettons aux taux d’imposition au Canada de dépasser ceux de nos principaux partenaires commerciaux, les entreprises et les investisseurs seront davantage incités à s’implanter et à se développer ailleurs, et les travailleurs qualifiés très mobiles se déplaceront vers des territoires où ils pourront conserver une plus grande partie de leurs revenus. Inversement, un système fiscal compétitif agit comme un aimant à la fois pour le capital et pour les travailleurs hautement qualifiés, alimentant la productivité de l’effectif et la croissance économique.
Au sortir de cette crise sans précédent, la reprise économique sera inégale et difficile, ce n’est donc pas le moment d’augmenter les impôts. Durant la période qui suivra la pandémie, les pays du monde entier seront plus que jamais en compétition pour attirer les capitaux, et ceux qui ont de l’argent à investir auront de nombreuses possibilités. Le Canada ne peut pas se permettre d’être considéré comme un territoire à taux d’imposition élevé.
Actuellement, le rapport entre les impôts et le PIB du Canada ― soit le niveau global d’imposition par rapport à la taille de notre économie ― est légèrement inférieur à la moyenne de l’OCDE. Mais par rapport au PIB, les impôts sur les bénéfices des entreprises et les cotisations sociales au Canada sont tous deux nettement plus élevés que la moyenne de l’OCDE. L’Allemagne, les États-Unis, le Royaume- Uni, la France, l’Australie, la Suède et le Danemark (entre autres pays) perçoivent tous moins d’impôts sur les sociétés que le Canada par rapport au PIB22.
De la même manière, les impôts sur le revenu personnel sont plus élevés au Canada, en proportion du PIB, que dans des pays comme l’Allemagne, les États-Unis, la France, le Royaume-Uni, le Japon, la Corée et l’Australie. Le taux d’imposition marginal supérieur moyen sur le revenu des particuliers au Canada ― taux fédéral et provincial combinés ― est de 53,5 %. À titre de comparaison, il est de 47,5 % en Corée et en Allemagne, de 47 % en Australie et au Royaume-Uni, de 46 % aux États-Unis et de 33 % en Nouvelle-Zélande23.
Outre une réductions importantes des taux d’imposition des particuliers et des sociétés, comment le Canada peut-il faire en sorte que son système fiscal soit plus compétitif au niveau mondial? L’un des moyens serait de déplacer progressivement le système fiscal vers les taxes à la consommation, comme cela est la tendance dans la plupart des économies avancées. Une autre serait de moderniser et de simplifier le système fiscal, en éliminant les dépenses fiscales inefficaces tout en réduisant les coûts de conformité. En 2019, une analyse de la Banque mondiale a classé le Canada au 19e rang mondial pour la facilité de paiement des impôts des sociétés, loin derrière des pays comme l’Irlande, le Danemark et la Nouvelle-Zélande. La même étude a révélé que les entreprises canadiennes, toutes tailles confondues, avaient besoin en moyenne de 131 heures par année pour préparer et payer leurs impôts. Leurs équivalents en Australie et au Royaume-Uni n’avaient besoin que de 105 heures pour s’acquitter de leurs impôts, tandis que les entreprises en Finlande n’avaient besoin que de 90 heures.
Pour y arriver, les gouvernements doivent s’engager à lutter contre l’évasion fiscale, notamment par l’entremise du cadre d’érosion de la base d’imposition et transfert de bénéfices (BEPS) dirigé par le G20 et l’OCDE. L’objectif ultime des décideurs politiques doit être de mettre sur pied un système fiscal qui favorise la croissance, la productivité et l’innovation et qui crée un avantage concurrentiel pour le Canada plutôt que de dissuader les investisseurs et nuire à la création d’emplois.
Les idées
Plus que jamais, la réussite économique du Canada dépend de l’exploitation de notre capital intellectuel. L’innovation est le moteur de la croissance de la productivité qui, à son tour, rehausse le niveau de vie. C’est notre bien-être collectif qui en dépend.
Pourtant, notre écosystème en matière d’innovation est faible et déséquilibré. Il est vrai que le Canada est relativement performant au début de la chaîne de l’innovation, comme le montrent les investissements publics dans la recherche fondamentale et le taux de création d’entreprises. Mais nous faisons piètre figure lorsqu’il s’agit de développer des entreprises innovantes et de créer des entreprises compétitives à l’échelle mondiale. Trop d’entreprises à fort potentiel quittent le Canada, en particulier dans des secteurs tels que les technologies de l’information et médicales. C’est comme si nous entraînions des athlètes à fort potentiel pour ensuite les envoyer à l’étranger remporter des médailles olympiques pour d’autres pays.
Améliorer la commercialisation de notre recherche
Pour que notre pays puisse récolter les fruits de nos investissements collectifs dans l’innovation, nous devons améliorer notre capacité à transformer le savoir et le capital intellectuel en produits et services commerciaux. Historiquement, nous avons sous-estimé notre propriété intellectuelle en tant que source de richesse économique et nous l’avons bradée à des entreprises étrangères.
Une partie du problème est que les dépenses publiques du Canada en matière de recherche et développement (R et D) ne constituent pas un moteur important de la croissance économique nationale. Les fonds distribués par les trois conseils subventionnaires aux universités, aux institutions de recherche et aux laboratoires publics devraient servir à renforcer la capacité d’innovation et la productivité du Canada. Ces fonds devraient soutenir un écosystème d’innovation plus large et contribuer à combler l’écart entre les avantages publics et les coûts privés. Les arguments en faveur de telles dépenses sont toutefois affaiblis lorsque la propriété intellectuelle développée au Canada, avec l’aide de fonds publics, finit par être acquise par des entreprises étrangères, de sorte que ce sont d’autres pays qui profitent de la plupart des avantages commerciaux de cette propriété intellectuelle.
Le défi pour le Canada consiste à créer un écosystème d’innovation plus solide qui contribue à la croissance, à la productivité et à l’amélioration du niveau de vie. Les incitations traditionnelles à l’offre ― telles que les subventions à la recherche universitaire ou les subventions fiscales à la R et D ― renforcent la capacité d’innovation de l’économie, mais ne tiennent pas compte de l’aspect de l’équation lié à la demande. Autrement dit, nos politiques d’innovation n’ont pas assez de mordant pour arriver à accélérer la propagation et l’adoption de nouvelles technologies, créer de nouveaux marchés et convertir les atouts scientifiques en performances économiques.
Ces dernières années, un nombre croissant d’experts ont recommandé au gouvernement fédéral de rééquilibrer la politique d’innovation canadienne en mettant davantage l’accent sur la demande.
« En fin de compte, en créant de nouvelles opportunités de marché et/ou en intensifiant la concurrence, la politique d’innovation axée sur la demande peut avoir une incidence directe sur les comportements des entreprises en quête de profits et les inciter à innover », a écrit Peter Nicholson, président fondateur du Conseil des académies canadiennes, dans un article publié en 2018 par l’Institut de recherche en politiques publiques.
Les gouvernements peuvent stimuler la demande d’innovations de pointe dans l’économie de plusieurs façons, notamment par l’utilisation stratégique des marchés publics (voir ci-dessous). Mais parmi les autres outils à leur disposition, les décideurs politiques canadiens devraient envisager l’adoption d’une stratégie axée sur une mission ou un défi en particulier pour stimuler l’innovation, créer de nouveaux marchés et accélérer la commercialisation des biens et services canadiens. Aux États-Unis, des organisations axées sur la mission telles que la DARPA (Defense Advanced Research Projects Agency, créée en 1958 en réponse au lancement de Spoutnik par l’Union soviétique) et l’ARPA-E (Advanced Research Projects Agency-Energy, créée en 2009) fonctionnent comme des intermédiaires du secteur public entre la science et l’industrie pour mener des recherches de pointe. Comme l’observe un récent document publié par le Forum des politiques publiques, « le mandat de la DARPA est de mener des initiatives “à haut risque et à haute récompense”. Sa liste d’échecs est sans doute plus longue que celle de ses succès, mais son effet net sur l’innovation et la commercialisation aux États-Unis est profond 24. »
Exploiter et protéger nos idées
Dans un monde où la valeur économique provient de plus en plus d’actifs immatériels, nous devons créer, exploiter et conserver davantage de propriétés intellectuelles au Canada. La réalité, cependant, est que le Canada est peu performant en termes de création de brevets et d’investissements dans la propriété intellectuelle sous forme de pourcentage du PIB. L’investissement dans la propriété intellectuelle représentait 2,3 % du PIB canadien en 2005, mais il est tombé à 1,7 % au troisième trimestre de 2019. Cette situation contraste fortement avec celle des États-Unis, où l’investissement dans la propriété intellectuelle est passé de 3,6 % du PIB en 2005 à 4,8 % au quatrième trimestre de 2019. Ces chiffres permettent d’expliquer pourquoi aucune entreprise canadienne ne figure parmi les 200 plus grands investisseurs du secteur privé en R et D, selon les données compilées par Bloomberg.
Le domaine de l’intelligence artificielle offre un exemple consternant du défi qui nous attend. Bien que l’on suggère souvent que le Canada dispose d’un avantage comparatif dans ce domaine en pleine expansion, la vérité est que le Canada n’apparaît nulle part dans les dépôts de demande de brevet. La Chine, les États-Unis, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, le Japon et la Corée du Sud représentent la quasi-totalité des dépôts de demande de brevet dans ce domaine25. Oui, le Canada peut prétendre à une capacité de recherche et développement impressionnante en matière d’intelligence artificielle, mais nous n’avons pas encore réussi à faire en sorte que cette capacité produise des résultats commerciaux substantiels et des entreprises de premier plan à l’échelle mondiale.
Comment pouvons-nous renverser la vapeur? Une solution consisterait à tirer leçon de l’expérience des pays qui obtiennent de meilleurs résultats que le Canada en matière de production de propriété intellectuelle. Par exemple, le German Patent and Trade Mark Office (DPMA) est un fournisseur de services clé dans le domaine de la protection de la propriété industrielle. Cet organisme a pour tâche principale d’octroyer, d’enregistrer, d’administrer et de publier les droits de propriété intellectuelle, y compris les brevets, les modèles d’utilité, les conceptions et les marques déposées. L’approche allemande, dont témoigne le nombre de demandes de brevet déposées par les instituts Fraunhofer, accorde beaucoup d’importance à la création et à la conservation des brevets. Le DPMA joue un rôle de conseiller et de facilitateur proactif pour constituer un solide portefeuille de propriété intellectuelle dans lequel les entreprises allemandes peuvent puiser. En revanche, le rôle du Bureau des brevets du Canada consiste essentiellement à accorder des droits de propriété intellectuelle et à transmettre des connaissances et des informations générales sur la propriété intellectuelle.
Veiller à ce que les marchés publics alimentent l’innovation canadienne
Il y a actuellement peu de liens entre le programme du Canada en matière d’innovation et les marchés publics, y compris en ce qui concerne les investissements dans les infrastructures et les capacités de défense de notre pays. Pour la plupart, ils sont traités comme des objectifs politiques distincts. Encourager l’innovation locale n’est tout simplement pas considéré comme un objectif important dans les processus d’approvisionnement, pas plus que ne l’est la mise au point de technologies destinées au marché de l’exportation.
Le Canada doit repenser les marchés publics afin qu’ils deviennent non seulement un moyen d’acquérir des biens et des services, mais aussi un moteur en matière d’innovation et de croissance économique. Cela nécessitera des ajustements financiers et politiques. En particulier, le gouvernement fédéral devrait permettre aux différents ministères et organismes responsables des marchés publics, notamment l’Agence spatiale canadienne et le ministère de la Défense nationale, de soutenir l’innovation axée sur les marchés publics. Des exemples passés d’innovation canadienne réussie, tels que le Canadarm et le canola, ont bénéficié de cette approche.
Soutenir les leaders canadiens
Les gouvernements ne peuvent pas se soustraire aux décisions concernant les résultats du marché qu’ils préfèrent et les objectifs économiques qu’ils choisissent de privilégier. La neutralité totale du marché n’est pas possible. La question pour le Canada n’est donc pas de savoir s’il est temps de mener une politique industrielle. Le gouvernement fédéral dépense déjà des milliards de dollars par an pour des programmes et des initiatives industrielles qui favorisent certains résultats du marché plutôt que d’autres. La question plus pratique est de savoir si nous devons nous en tenir à la situation actuelle ― une politique industrielle fragmentée et peu convaincante ― ou adopter une stratégie industrielle plus cibléeet intentionnelle.
Les faits observés aux États-Unis, au Royaume-Uni, au Japon, en Allemagne et aux Pays-Bas semblent clairs : le modèle post-COVID-19 comprendra un rôle plus actif de l’État dans le soutien à l’innovation technologique et dans certains secteurs à l’intéreieur des frontières nationales. Un consensus politique bipartite à Washington D.C., qui favorisait autrefois l’engagement économique avec la Chine, a été remplacé par un nouveau consensus qui considère la Chine comme une menace économique et géopolitique en grande partie en raison de son leadership technologique émergent. Par conséquent, le Committee on Foreign Investment in the United States (CIFIUS) examine désormais de près les investissements chinois et y impose des restrictions plus importantes. Cette « dissociation » signifie que les États-Unis soutiennent désormais vigoureusement leurs entreprises technologiques et qu’ils financent et développent de nouvelles capacités pour devenir autonomes d’un bout à l’autre de la chaîne d’approvisionnement.
En 2019, le ministre allemand de l’Économie a présenté une série de propositions pour une nouvelle stratégie industrielle, notamment la création d’un fonds d’investissement d’État qui interviendrait pour empêcher les rachats étrangers d’entreprises allemandes de premier plan.
« Il faut redéfinir la politique industrielle de l’Allemagne afin que l’industrie reste un noyau fort de l’économie allemande », a indiqué le ministre allemand de l’Économie et de l’Énergie, citant la numérisation, les changements climatiques et l’évolution démographique comme des forces clés qui mettent en péril la compétitivité allemande.
Entre-temps, la Commission européenne a établi un cadre pour élaborer une série de missions intersectorielles telles que la cure du cancer, l’adaptation aux changements climatiques, l’écologisation des villes et la santé des océans. En janvier dernier, elle a annoncé un nouvel accord écologique ambitieux dont l’objectif est d’atteindre la carboneutralité d’ici 2030. Le plan consiste à investir dans des technologies propres, à aider l’industrie à innover, à mettre en place des formes de transport privé et public moins polluantes, moins coûteuses et plus saines, à « décarboniser » le secteur de l’énergie et à faire en sorte que les bâtiments soient moins énergivores. Pour sa part, le gouvernement britannique a défini une stratégie industrielle basée sur quatre grands défis : l’essor de l’intelligence artificielle et des données, les besoins d’une société vieillissante, la croissance propre et l’avenir de la mobilité.
Il y a lieu de se demander si une telle démarche serait bonne pour le Canada. Une stratégie industrielle axée sur les secteurs ayant un avantage comparatif ― tels que l’agroalimentaire, l’énergie et les énergies renouvelables, les soins de santé et les sciences de la vie/biosciences et la fabrication de pointe ― aiderait-elle les Canadiens à mieux exploiter leurs forces et leur donnerait-elle les outils dont ils ont besoin tirer leur épingle du jeu à l’échelle mondiale? Certes, le gouvernement fédéral a annoncé ces dernières années une série de programmes nouveaux (ou remaniés) axés sur l’innovation, notamment l’initiative des supergrappes, le Fonds stratégique pour l’innovation et Solutions innovatrices Canada. Mais étant donné la vitesse à laquelle les autres pays évoluent, il est peut-être temps de procéder à un examen beaucoup plus rigoureux, exhaustif et réfléchi de notre boîte à outils actuelle.
Pour voir comment cela pourrait fonctionner dans la pratique, prenons comme exemple le secteur de l’énergie et des énergies renouvelables. Le gouvernement fédéral pourrait en faire davantage pour positionner le Canada comme un chef de file dans la transition vers une économie à faibles émissions de carbone, notamment en favorisant les exportations de produits et de technologies qui permettraient à d’autres pays de réduire leurs émissions. Cela pourrait contribuer à maximiser la valeur des ressources du Canada, tout en réduisant son empreinte écologique. Une stratégie industrielle qui soutiendrait la recherche du secteur privé, l’adoption à moindre coût de technologies à faibles émissions de carbone et le déploiement à plus grande échelle de technologies prometteuses pourrait générer des avantages économiques et environnementaux considérables.
Conclusion
Depuis des années, les économistes et les analystes politiques s’inquiètent du ralentissement de la croissance économique au Canada. D’innombrables études et rapports sont parvenus à des conclusions similaires : la population de notre pays vieillit, la croissance de la productivité de notre main-d’oeuvre est inférieure à celle de nombreux autres pays industrialisés et nous prenons du retard lorsqu’il s’agit d’attirer et de retenir les investissements des entreprises. Il y a un an, le Groupe de travail sur l’avenir économique du Canada du Conseil canadien des affaires a fait une mise en garde indiquant qu’avec le temps, ces tendances menaceraient sérieusement le niveau et la qualité de vie des Canadiens. « Une croissance économique plus lente à long terme », a indiqué le groupe de travail dans son rapport final, « signifiera inévitablement moins de possibilités pour nos enfants et petits-enfants, des taux de chômage plus élevés et moins d’argent pour les services publics qui nous sont chers tels que les soins de santé, l’éducation et le transport ».
Ce constat semblait décourageant à l’époque, mais la pandémie de COVID-19 n’a fait qu’exacerber les difficultés auxquelles l’économie canadienne est confrontée. Nous sommes entrés en 2020 avec un taux de chômage national de 5,5 %; il est maintenant de 9 %. Le déficit budgétaire fédéral en 2020-2021 devait initialement atteindre les 28,1 milliards de dollars, or il est maintenant en voie d’atteindre au moins les 343 milliards de dollars. Des milliers de petites entreprises ont été poussées au bord du gouffre, des industries entières ont été perturbées et de nombreuses villes sont confrontées à des difficultés budgétaires. En bref, l’économie canadienne est plus fragile maintenant qu’elle ne l’a jamais été depuis les années 1930.
Pour sortir de cet abîme, une seule solution : les décideurs politiques canadiens doivent agir de manière décisive pour renforcer le potentiel économique du pays et créer les conditions propices à une croissance à long terme. De toute évidence, il n’existe pas de solution miracle. Pour s’attaquer aux causes sous-jacentes du malaise économique du Canada, il faudra de l’ambition, du leadership et beaucoup de travail. Nous devons reconnaître en toute franchise nos faiblesses, rejeter la complaisance et nous résoudre à faire du Canada le pays qu’il peut être, soit le meilleur endroit au monde où vivre, travailler, investir et prospérer.
Pour bâtir un avenir florissant pour les Canadiens, il faudra agir sur trois fronts : les gens, les capitaux et les idées.
Les gens : Nous devons cultiver et améliorer notre capital humain en développant un effectif agile, en aidant davantage les jeunes Canadiens et Canadiennes à se bâtir une carrière enrichissante, et en nous appuyant sur le succès de notre système d’immigration pour faire de notre pays un pôle d’attraction encore plus irrésistible pour les talents internationaux.
Les capitaux : Nous devons intensifier les investissements des entreprises en adoptant une stratégie axée davantage sur les infrastructures, en renforçant le commerce interprovincial, en supprimant les obstacles réglementaires inutiles et en veillant à ce que notre système fiscal soit compétitif à l’échelle mondiale.
Les idées : Dans un monde où la création de richesse repose sur la connaissance et l’innovation, nous devons mieux rentabiliser notre recherche, protéger notre propriété intellectuelle, tirer parti du potentiel des marchés publics et mettre en oeuvre une stratégie industrielle réfléchie qui tire parti des atouts nationaux du Canada pour réussir sur le marché mondial.
Au cours des prochains mois, le Conseil des affaires s’adressera à des experts politiques, des partenaires et des intervenants dans tout le pays. Nous solliciterons leurs conseils et leur contribution alors que nous nous efforçons de définir la voie à suivre fondée sur des recommandations concrètes et détaillées dans chacun des domaines prioritaires relevés dans le présent document. Dans un même temps, nous élaborerons des recommandations sur la voie à suivre pour que le pays atteigne l’objectif zéro émission nette de GES d’ici 2050 ― un objectif qui exigera une capacité financière, une maind’oeuvre qualifiée et l’engagement manifeste des secteurs de l’énergie et des ressources du Canada à l’égard de l’innovation.
Ce n’est qu’en travaillant ensemble, comme l’ont fait les gens et leurs gouvernements pour faire face à la crise de la COVID-19, que nous pourrons atteindre nos objectifs communs. Nous sommes convaincus que les Canadiens et Canadiennes peuvent relever ce défi.
Notes de bas de page
1 https://ppforum.ca/fr/publications/deux-pics-a-franchie-les-deux-deficits-du-canada-et-comment-les-proportionner/
2 https://www150.statcan.gc.ca/n1/daily-quotidien/190930/cg-a003-fra.htm
3 https://www.budget.gc.ca/efu-meb/2019/docs/statement-enonce/chap01-fr.html#s5
4 https://www.brookings.edu/wp-content/uploads/2018/06/Canadas-Advanced-Industries_18-06-05_FINAL2.pdf
5 https://www.cdhowe.org/intelligence-memos/paul-jenkins-%E2%80%93-long-%E2%80%A6-and-short-finding-equilibrium
6 « Conversations with Tyler ». Paul Romer on the Unrivalled Joy of Scholarship. 5 décembre 2018 [Balado].
7 https://www.linkedin.com/pulse/how-win-skills-game-10-ideas-2020s-john-stackhouse/
8 https://munkschool.utoronto.ca/mowatcentre/the-seventy-five-year-decline/
9 https://munkschool.utoronto.ca/mowatcentre/fixing-canadas-ei-system-is-critical-for-the-future-of-work/
10 https://www.budget.gc.ca/efu-meb/2019/docs/statement-enonce/efu-meb-2019-fra.pdf
11 https://leadershipavise.rbc.com/la-pandemie-menace-des-decennies-de-progression-des-femmes-au-sein-de-la-populationactive/?_ga=2.257822987.1254471762.1604868866-579185546.1604868866
12 https://www150.statcan.gc.ca/n1/daily-quotidien/201009/dq201009a-fra.htm
13 https://ppforum.ca/fr/publications/ecarts-de-competences-pour-des-personnes-en-situation-de-handicap/
14 Banque du Canada. Economic Progress Report: Investing in Growth. 2019. Sur Internet : https://www.banqueducanada.ca/2019/05/le-point-sur-la-situation-economique-investir-dans-la-croissance/
15 Deliotte. Fiche de pointage de la compétitivité du Canada. 2019.
16 https://ppforum.ca/fr/publications/deux-pics-a-franchie-les-deux-deficits-du-canada-et-comment-les-proportionner/
17 https://on360.ca/30-30/strategic-infrastructure-transition-briefing/
18 Discours de l’honorable Joe Hockey à la Federal P3 Conference. 27 novembre 2018.
19 Bemrose, R., W.M. Brown, W.M. et J. Tweedle. « Going the distance: estimating the effect of provincial borders on trade when geography matters (No. 2017394e) ». Statistique Canada, Direction des études analytiques, 2017.
20 Porter, D. et R. Kavcic. Sizing Up Provincial Trade Barriers. BMO Capital Markets Corp. 26 octobre 2018.
21 https://on360.ca/30-30/strategic-infrastructure-transition-briefing/
22 https://data.oecd.org/tax/tax-on-corporate-profits.htm#indicator-chart
23 https://data.oecd.org/tax/tax-on-personal-income.htm#indicator-chart
24 https://ppforum.ca/publications/new-north-star-2-revisited/
25 https://www.wipo.int/edocs/pubdocs/en/wipo_pub_1055.pdf