Introduction

Lors de la réunion inaugurale du Dialogue économique de haut niveau (DEHN) entre le Canada et le Mexique, la secrétaire à l’Économie du Mexique, la ministre canadienne du Commerce international, de la Promotion des exportations, de la Petite Entreprise, et du Développement économique, et le ministre canadien de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie ont demandé au CCA et au CMN de produire une étude conjointe assortie de recommandations concrètes identifiant les secteurs prioritaires pour les programmes pilotes et les partenariats potentiels.

Le CMN et le CCA ont accueilli favorablement cette demande et, à cette fin, soumettent respectueusement ce rapport pour un examen plus approfondi lors de la prochaine réunion du DEHN entre le Canada et le Mexique. Pour résumer, les milieux d’affaires mexicains et canadiens estiment qu’il est temps de se concentrer davantage sur le renforcement des relations économiques bilatérales entre nos deux pays. En outre, les chefs d’entreprise estiment qu’il existe un potentiel inexploité important et des possibilités économiques considérables que nous pouvons exploiter.

Dans cet esprit, et alors que ce rapport était en cours de préparation, le CMN et le CCA ont lancé un Sommet d’affaires Canada-Mexique - un forum annuel visant à accroître le commerce et les investissements bilatéraux. Le Sommet réunira des chefs d’entreprise des deux pays et servira de contrepartie du secteur privé au DEHN des gouvernements. La première réunion du Sommet d’affaires Canada-Mexique aura lieu au Mexique à une date à déterminer au premier trimestre 2023.

l’ACEUM a encore démontré l’importance et le potentiel du partenariat économique bilatéral entre le Canada et le Mexique - un potentiel qui n’a pas encore été pleinement exploité.

Les relations commerciales entre le Canada et le Mexique

Il y a une génération, l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) a stimulé le commerce entre le Canada et le Mexique. Entre 1994 et le début de la pandémie de COVID-19, le total des importations canadiennes en provenance du Mexique a presque décuplé, passant de 3,7 milliards de dollars à 36,9 milliards de dollars.1  L’ALENA a non seulement offert un accès préférentiel aux marchés par la réduction ou l’élimination des droits de douane, mais il a également atténué les obstacles et l’incertitude pour les entreprises qui cherchent à pénétrer nos marchés respectifs. Il s’agissait d’une base solide.

Aujourd’hui, L’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM), qui a succédé à l’ALENA, s’appuie sur cette base solide en renforçant la compétitivité à l’échelle du continent et en assurant un haut niveau de prévisibilité pour les entreprises et les investisseurs des trois pays. Au cours des deux premières années depuis son entrée en vigueur, l’ACEUM a encore démontré l’importance et le potentiel du partenariat économique bilatéral entre le Canada et le Mexique - un potentiel qui n’a pas encore été pleinement exploité.2 

GRAPHIQUE 1: COMMERCE ENTRE LE MEXIQUE ET LE CANADA 1993 À 2021
(MILLIONS $ US)

Source : Statistics Canada and Secretaría de Economía.

Comme le montre clairement le graphique ci-dessous, le commerce bilatéral entre le Canada et le Mexique a suivi une tendance constante à la hausse, sauf pour deux événements intermédiaires, la récession mondiale de 2008-2009 et la pandémie mondiale de 2020. La résilience et la robustesse du partenariat économique sont attestées par le fait que les échanges commerciaux ont rebondi rapidement et de manière significative dans les années qui ont suivi ces deux événements. Cela prouve que les principes fondamentaux du partenariat économique sont solides.

Étant donné la nature hautement intégrée de l’économie continentale nord-américaine, nous devons tenir compte de notre voisin commun, les États-Unis. Les États-Unis sont le premier partenaire commercial du Canada et du Mexique, représentant plus de 75 % du commerce international de chaque pays. Non seulement les relations commerciales actuelles entre le Canada et le Mexique sont sous-développées par rapport à leurs échanges respectifs avec les États-Unis, mais elles ne présentent pas non plus la même diversité. 

Le commerce entre le Canada et le Mexique est largement dominé par le secteur automobile, qui représente 35 % de toutes les importations canadiennes en provenance du Mexique (12 milliards $ par an). Les exportations du Canada vers le Mexique sont un peu plus diversifiées, englobant l’agroalimentaire, les véhicules à moteur et les biens de consommation, mais la valeur totale est nettement inférieure à la valeur des exportations du Mexique vers le Canada. Heureusement, il existe d’importantes complémentarités entre les deux économies, prêtes à être saisies.

Plus précisément, le Mexique a une population en âge de travailler beaucoup plus importante, avec plus de 38,8 millions de citoyens âgés de 20 à 40 ans, soit plus que la population totale du Canada. Les travailleurs mexicains se sont révélés inestimables pour l’économie canadienne en tant qu’immigrants qualifiés, travailleurs étrangers temporaires et travailleurs agricoles saisonniers. Le Canada étant actuellement confronté à une pénurie croissante de main-d’œuvre, une mobilité transfrontalière accrue de la main-d’œuvre pourrait avoir un impact immédiat.

Le Canada, quant à lui, possède une expertise considérable dans des domaines où la demande mexicaine est en hausse, notamment l’aérospatiale, les services financiers, les technologies vertes et les infrastructures énergétiques. À titre d’exemple, on a récemment annoncé que TC Energy allait construire le Southeast Gateway Pipeline, un projet d’infrastructure énergétique vital pour le transport du gaz naturel, d’une valeur de 4,5 milliards $. De nouveaux investissements dans des infrastructures favorables aux exportations sont désespérément nécessaires dans nos deux pays.

En outre, les gouvernements mexicain et canadien ont, à juste titre, donné la priorité aux efforts visant à assurer une plus grande participation des femmes, des autochtones et des autres groupes sous-représentés à notre économie continentale intégrée. Pour que la croissance économique bilatérale soit inclusive, durable, équitable et diversifiée, il est essentiel que nos secteurs publics et privés respectifs trouvent des moyens novateurs et imaginatifs de mobiliser et de tirer parti du plein potentiel de tous nos peuples.

Recommandations

D’après ce qui précède, et en réponse à la demande de recommandations concrètes, le CCA et le CMN proposent respectueusement que les secteurs public et privé du Mexique et du Canada se concentrent sur les cinq domaines suivants. Soyons clairs, cette liste n’est pas exhaustive. Nous reconnaissons que de nombreux autres domaines méritent, voire exigent, une plus grande attention, notamment des échanges culturels spécifiques et un éventuel centre universitaire pour des études économiques, politiques et sociales bilatérales.

Recommandation 1: Promouvoir les investissements bilatéraux dans les secteurs prioritaires 

Le Mexique et le Canada devraient promouvoir et privilégier les investissements bilatéraux dans les secteurs clés de l’innovation, notamment l’agrotechnologie, la technologie propre, la technologie médicale et la fabrication de pointe. En outre, l’investissement dans les infrastructures propices au commerce - infrastructures d’exportation énergétique, augmentation de la capacité des ports maritimes et modernisation des postes-frontières terrestres pour les transports routiers et ferroviaires - améliorerait la résilience de la chaîne d’approvisionnement, favoriserait l’externalisation proche et renforcerait les liens commerciaux entre nos deux pays et la compétitivité de notre continent commun. Un accord entre les régulateurs des valeurs mobilières et les bourses pourrait également aider les entreprises à accéder aux marchés de capitaux de chaque pays.

Recommandation 2: Simplifier la mobilité transfrontalière de la main-d’œuvre

Le Canada et le Mexique devraient collaborer à la création de processus accélérés pour l’approbation de permis de travail temporaire et la reconnaissance des titres de compétences de la main-d’œuvre dans les secteurs essentiels qui connaissent actuellement des pénuries de main-d’œuvre ou de compétences. La simplification de la mobilité de la main-d’œuvre entre le Mexique et le Canada permettrait d’accroître la compétitivité à l’échelle du continent et de renforcer les liens économiques bilatéraux. Parmi les secteurs prioritaires ayant un besoin urgent de main-d’œuvre qualifiée, et identifiés dans le Programme des travailleurs étrangers temporaires du Canada, figurent l’agriculture, les soins de santé, la foresterie, la construction, l’hôtellerie, la pêche, et l’exploitation minière. 

Recommandation 3: Élaborer une stratégie commune pour promouvoir des politiques qui garantissent la compétitivité de nos secteurs manufacturiers.

Une stratégie commune serait axée sur l’identification des intérêts communs du Mexique et du Canada en matière de politiques de commerce et d’investissement, avec un accent particulier sur la fabrication et l’innovation qui soutiennent la transition vers l’énergie verte. Un des principaux objectifs de ce travail sera de s’assurer que ces politiques renforcent la compétitivité nord-américaine. Cette stratégie pourrait être un volet permanent du Dialogue économique de haut niveau entre le Canada et le Mexique.

Recommandation 4: Donner la priorité à un plus grand engagement des gouvernements infranationaux

La relation bilatérale Canada-Mexique est presque toujours abordée comme une relation entre deux entités. Étant donné que d’importantes activités de développement économique relèvent de la compétence des 32 États du Mexique et des 10 provinces et 3 territoires du Canada, des efforts devraient être déployés pour promouvoir un engagement accru entre ces gouvernements. Un tel effort pourrait consister à établir une conférence annuelle sur le modèle de la rencontre SEUS-CP (Alliance des États du Sud-Est des États-Unis et des provinces canadiennes de l’Est) qui réunit des États américains et des provinces canadiennes pour identifier les possibilités de commerce et d’investissement au niveau infranational. 

Recommandation 5: Accroître la collaboration entre les secteurs public et privé pour protéger les infrastructures intégrées contre les cyberattaques et autres menaces pour la sécurité

Le Mexique et le Canada doivent travailler ensemble pour améliorer la résilience de notre chaîne d’approvisionnement intégrée, de nos infrastructures de transport et énergétiques face à la hausse et à l’évolution des cyberattaques et autres menaces. Un échange accru d’informations et de renseignements entre les gouvernements et les entreprises permettrait de mieux protéger les infrastructures essentielles contre ceux qui veulent perturber ou désactiver les principaux réseaux transfrontaliers. Le Canada et le Mexique pourraient également envisager de créer un Dialogue de haut niveau sur la sécurité pour compléter notre Dialogue économique de haut niveau (DEHN) bilatéral nouvellement établi.

Recommandation 6:  Examiner la possibilité de créer un centre d’excellence virtuel bilatéral pour les entreprises dirigées par des femmes et des minorités

L’objectif du centre serait de fournir aux femmes, aux minorités et aux entrepreneurs autochtones ainsi qu’aux chefs d’entreprise des informations allant du développement des marchés et des réglementations en matière d’exportation et d’importation à la gestion de la chaîne d’approvisionnement. Il pourrait inclure des modules de formation sur la manière d’accéder aux capitaux d’investissement, aux programmes de diversification des fournisseurs et aux aides gouvernementales. Le programme des femmes exportatrices d’UPS Canada et l’Institut mexicain pour la compétitivité (Mexican Institute for Competitiveness) du CMN pourraient servir de modèles pour un programme bilatéral qui comprendrait également les PME minoritaires et autochtones. Le centre pourrait offrir des possibilités de mise en réseau B2B (business to business) où des contacts et des relations d’affaires pourraient être établis. 

Affaires mondiales Canada L’Accord Canada–États-Unis–Mexique: Évaluation de l’impact économique. 2020.

En plus de l’ACEUM, le Canada et le Mexique sont tous deux parties à l’Accord de partenariat transpacifique global et progressif (PTPGP) qui offre des possibilités supplémentaires aux investisseurs et aux exportateurs.