INTRODUCTION

Le Canada s’est toujours classé parmi les meilleurs pays du monde pour sa qualité de vie élevée. Des ressources naturelles abondantes, une population très scolarisée et des liens internationaux solides ont contribué au niveau de vie enviable.

Mais le progrès a ralenti.

Selon les données provenant de diverses sources, dont Statistique Canada, l’OCDE et d’autres instituts de recherche économique, le Canada a connu une période de léthargie économique au cours des 15 dernières années.

Les Canadiens risquent de voir leur qualité de vie, y compris l’accès à des services publics essentiels, diminuer si le pays ne change pas de cap.

Le progrès est un choix, et les décideurs politiques ont la responsabilité de garantir que le niveau de vie et les salaires des Canadiens ne stagnent pas ou ne se détériorent pas. Il est urgent que les décideurs politiques mettent en place les conditions propices à l’édification d’une société tournée vers l’avenir, qui tire parti de l’innovation pour favoriser la prospérité économique.

Il y a moins d’un siècle, la Corée du Sud et Singapour figuraient parmi les nations les plus pauvres du monde. La Finlande était nettement sous-développée par rapport à ses homologues d’Europe occidentale. Aujourd’hui, grâce à des politiques économiques axées sur l’innovation technologique, les situations de ces trois pays se sont radicalement inversées, les classant parmi les économies les plus avancées du monde.

Le Canada peut faire de même.

Ce document présente une feuille de route et des recommandations pratiques et réalisables pour que le Canada alimente les moteurs de croissance à long terme, non seulement pour les prochains trimestres, mais aussi pour les décennies à venir, au bénéfice de tous les Canadiens.

La thèse est simple : l’adoption d’un programme économique favorable aux travailleurs signifie que l’économie canadienne doit devenir plus technologique. Au lieu d’être axée sur la consommation, l’économie canadienne devrait être animée par la production et la concurrence à grande échelle dans les industries les plus avancées sur le plan technologique. Une économie innovante, productive et compétitive se traduira par des salaires plus élevés et de meilleures possibilités d’emploi pour les travailleurs canadiens. Elle favorisera le développement des compétences et l’apprentissage continu, ce qui renforcera les capacités et les perspectives de carrière de chacun.

Cette transition économique entraînera une hausse de la productivité, stimulant la croissance économique globale et améliorant le niveau de vie, ce qui profitera à tous. Elle permettra au Canada d’exporter des produits et des services de haute technologie, ce qui entraînera une augmentation des recettes nationales et une économie plus résiliente. Une économie plus forte permettra également au Canada d’exercer une plus grande influence sur la scène internationale, en contribuant à l’élaboration de politiques et d’initiatives mondiales conformes aux intérêts et aux valeurs du Canada.

INNOVATION TECHNOLOGIQUE ET CROISSANCE ÉCONOMIQUE

Pendant des siècles, la prospérité économique a reflété les progrès technologiques. Avant les années 1800, la plupart des économies étaient agraires, fortement dépendantes de l’agriculture, et la croissance de la productivité était lente. Débutant au Royaume-Uni à la fin du XVIIIe siècle, la révolution industrielle est devenue le catalyseur d’une croissance exponentielle.

Des inventions importantes, telles que la machine à vapeur, la mécanisation de la fabrication des textiles et les progrès de la métallurgie, ont transformé les processus de production, conduisant à une fabrication de masse et à des gains de productivité considérables. Les innovations dans le domaine des transports, notamment la locomotive à vapeur et l’amélioration du transport maritime, ont permis d’accélérer et d’étendre les échanges commerciaux.

Dans la dernière moitié du XIXe siècle, la deuxième révolution industrielle s’est caractérisée par l’expansion d’industries telles que l’acier et les produits chimiques. L’avènement de l’électricité a révolutionné les processus de production en permettant une fabrication continue et efficace, ce qui a fait baisser le prix des marchandises. Des innovations telles que le télégraphe et le téléphone ont amélioré la communication, renforçant ainsi le commerce mondial.

La troisième révolution industrielle a débuté dans les années 1970. L’essor de la technologie numérique a transformé radicalement la manière dont l’information est traitée, stockée et communiquée. La diffusion des technologies de l’information et de la communication (TIC) a transformé de nombreux secteurs, notamment la finance, les soins de santé, l’éducation et les loisirs.

Au cours des dix dernières années, nous avons été témoins d’une nouvelle phase d’innovation technologique axée sur la robotique et l’automatisation avancées, l’intelligence artificielle (IA) et l’apprentissage automatique, les mégadonnées et l’analytique avancée, la biotechnologie et la génomique, ainsi que l’informatique quantique.

L’histoire compte. La raison pour laquelle la croissance économique est devenue exponentielle à la fin du XVIIIe siècle est principalement attribuable à l’innovation technologique. Les progrès technologiques continus ont entraîné une croissance exponentielle de la productivité et de la production. Chaque nouvelle invention s’appuyait sur les innovations précédentes, créant ainsi un effet cumulatif. De même, les connaissances scientifiques et techniques ont stimulé les investissements dans la recherche et le développement (R&D).

Avec l’arrivée de I’innovation technologique, les économies ont prospéré, entraînant des améliorations considérables du revenu par habitant et du niveau de vie. Cette évolution a été accompagnée de la montée de la classe moyenne, l’augmentation du temps de loisirs et l’amélioration des soins de santé.

LE DÉFI CANADIEN

Après la Seconde Guerre mondiale, le Canada a connu une croissance économique et des gains de productivité considérables grâce à une industrialisation rapide, aux avancées technologiques et à des niveaux élevés d’investissement dans les infrastructures et l’éducation. Cela s’est traduit par une augmentation du niveau de vie et des possibilités économiques pour les Canadiens d’origines et de régions diverses.

L’expansion du secteur manufacturier et des ressources naturelles a joué un rôle essentiel dans l’augmentation de la productivité. Toutefois, le Canada a connu un ralentissement de la croissance de la productivité dans les années 1970, en partie en raison des chocs pétroliers et des récessions économiques qui ont suivi. La hausse des coûts de l’énergie et l’inflation ont pesé sur les performances économiques du pays.

La mise en œuvre de l’Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis en 1989, suivie de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) en 1994, a contribué à stimuler la productivité en améliorant l’accès au marché et la concurrence. D’autres améliorations de la productivité ont été réalisées suite à l’adoption de nouvelles technologies et une réorientation vers des industries axées sur le savoir.

La fin des années 1990 et le début des années 2000 ont été marqués par une nouvelle poussée de la productivité, grâce à l’adoption généralisée des TIC et à la diversification dans les produits et services de haute technologie.

Les améliorations constantes n’ont toutefois pas duré. Les performances économiques du Canada depuis la dernière grande crise financière de 2008 ont été décevantes. La performance canadienne a continué de se dégrader depuis la pandémie, en particulier par rapport aux pays pairs.

Ce mauvais résultat économique n’est pas attribuable à l’augmentation des taux d’intérêt. La raison en est claire : le Canada connaît une stagnation de sa productivité, c’est-à-dire, une incapacité à générer des revenus supplémentaires pour chaque heure travaillée.

De plus en plus de voix crédibles expriment leur inquiétude face au défi de la productivité au Canada : le gouverneur actuel de la Banque du Canada Tiff Macklem et la première sous-gouverneure Carolyn Rogers, les anciens gouverneurs de la Banque du Canada David Dodge, Mark Carney et Stephen Poloz, l’ancien ministre des Finances Bill Morneau et l’ancienne première sous-gouverneure de la Banque du Canada Carolyn Wilkins, de nombreux décideurs et économistes en chef des banques, des groupes de réflexion, des associations industrielles, des sociétés de conseil, les chroniqueurs nationaux Andrew Coyne, John Ivison et Kevin Carmichael et des économistes, notamment Trevor Tombe et Mikal Skuterud.

Le Canada est passé de la 6e économie la plus productive au sein des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en 1970 à la 18e en 2022.

Hors récession, l’économie canadienne a rarement été aussi faible sur le plan structurel. Elle est maintenant moins imposante qu’elle ne l’était en 2019 lorsqu’ajustée en fonction de l’inflation et de la population, et elle n’a guère progressé depuis dix ans. En fait, le Canada vient de connaitre sept années sans croissance économique par habitant.

Les indicateurs clés tels que le PIB par habitant, les investissements privés et les dépenses en R&D témoignent tous d’une faiblesse économique persistante.

Le PIB réel par habitant a maintenant fléchi au cours de six des sept derniers trimestres et se situe actuellement près des niveaux observés en 2017. Selon Statistique Canada, pour revenir à sa tendance prépandémique au cours de la prochaine décennie, le PIB par habitant devrait croître à un taux annuel moyen de 1,7 % par an. Un changement de cette ampleur constituerait un changement important par rapport aux tendances récentes.

En 1984, la valeur générée par heure dans l’économie canadienne représentait 88 % de celle générée dans l’économie américaine. En 2022, ce chiffre est passé à 71 %. Sur la même période, le Canada s’est également fait dépasser par les autres pays du G7, et seule l’Italie a vu sa productivité régresser davantage relativement aux États-Unis.

Comme l’a souligné Carolyn Rogers, première sous-gouverneure de la Banque du Canada, dans un discours prononcé le mars 2024 : « L’amélioration de la productivité au Canada doit être prioritaire pour tout le monde, et il y a deux grandes stratégies pour y parvenir. La première est d’axer l’économie sur les secteurs qui apportent une plus-value par rapport aux activités moins productives. La seconde est de continuer à faire le même travail, mais de façon plus efficace. Idéalement, le Canada recourrait aux deux stratégies ; l’économie profiterait ainsi d’une solide croissance de la productivité et d’une forte concentration d’activités à grande valeur. »

Le niveau de vie du Canada est déterminé par la productivité de l’ensemble de l’économie. Celle-ci doit augmenter dans tous les domaines, mais surtout dans les secteurs à forte valeur ajoutée de l’économie.


La désindustrialisation de nombreuses régions du Canada a eu des conséquences importantes. Plusieurs régions du Canada — notamment l’Ontario — ont traditionnellement soutenu l’économie par le secteur manufacturier. Mais comme l’illustre un rapport récent de la  RBC, l’incidence économique de l’industrie manufacturière est la moitié de ce qu’il était en 2000, tandis que l’exploitation minière a également diminué. Le problème est qu’à mesure que l’industrie manufacturière s’est contractée, elle n’a pas été remplacée par des industries à forte valeur ajoutée. Qui plus est, les niveaux d’investissement dans le secteur du pétrole et du gaz restent inférieurs à ce qu’ils étaient il y a dix ans.

Si la composition industrielle ou sectorielle est inquiétante, la taille des entreprises l’est tout autant.

Le Canada est devenu essentiellement une économie de l’immobilier et de la consommation. Quatre-vingt-dix-huit pour cent des entreprises canadiennes sont des petites et moyennes entreprises (PME), ce qui explique en partie la faiblesse structurelle des investissements des entreprises. Dans une certaine mesure, cela est le cas pour de nombreuses économies avancées. Deux questions interdépendantes sont au cœur du problème :

  • le Canada compte trop peu de grandes entreprises (qui consacrent de manière disproportionnée plus d’argent à la R&D et à l’innovation) et
  • trop peu de PME se développent ou grandissent.

Ces problèmes sont liés, car ce sont les entreprises les plus efficaces et les plus productives qui se développent. Les PME non productives ont peu de chances de se développer.

Par ailleurs, les investissements dans les structures résidentielles représentent une part du PIB deux fois plus importante au Canada qu’aux États-Unis. Les entreprises canadiennes investissent davantage dans les structures non résidentielles et moins dans les produits de propriété intellectuelle (PI). Le Canada investit environ 40 % de moins (en pourcentage du PIB) dans les produits de propriété intellectuelle en général.

Une économie de la taille du Canada qui produit une faible part de biens et de services pouvant être exportés sur les marchés mondiaux aura du mal à accroître sa productivité. 

Parmi les autres facteurs qui contribuent aux problèmes de compétitivité du Canada, on peut citer la résurgence de l’économie politique, l’intensification des tensions géopolitiques technologiques (comme entre la Chine et les États-Unis), l’essor des biens immatériels (données, PI) et les nouvelles exigences en matière de sécurité nationale, qui ont tous transformé le paysage politique et stratégique, à l’échelle nationale et internationale.

En outre, il convient de noter que la surcapacité industrielle de la Chine et sa dépendance à l’égard de la demande étrangère pour soutenir la croissance ont des conséquences sur la politique commerciale mondiale. Comme l’a récemment expliqué Janet Yellen, secrétaire au Trésor américain, le problème n’est pas lié aux exportations ou au fait que les entreprises chinoises disposent d’un avantage comparatif dans certains secteurs. Il s’agit plutôt de l’important soutien du gouvernment chinois, qui fait que la production ne répond pas à la demande du marché mondial — un problème unique à l’économie chinoise.

Le Canada est également confronté à un défi démographique de taille. Les Canadiens vieillissent et vivent plus longtemps.

Le 1er juillet 2023, près d’un Canadien sur cinq (18,9 % de la population) était âgé d’au moins 65 ans. L’écart se creuse entre le nombre de personnes de ce groupe d’âge et celui des enfants âgés de 0 à 14 ans (15,4 % de la population).

En 2000, le Canada comptait 18 personnes âgées pour 100 personnes en âge de travailler. En 2022, ce ratio a grimpé à 29 personnes âgées pour 100 personnes en âge de travailler. De plus en plus de retraités dépendent des recettes fiscales générées par de moins en moins de travailleurs. La décision prise en 2016 d’abaisser l’âge d’admissibilité à la Sécurité de la vieillesse (SV) à 65 ans ajoutera, au fil du temps, une pression importante au cadre financier.

La façon dont nous réagissons — ou non — aux faiblesses du Canada en matière de productivité aura des conséquences profondes sur le niveau de vie des Canadiens aujourd’hui et dans les années à venir.


Si les décideurs politiques veulent réellement défendre les intérêts des travailleurs, ils doivent se poser la question suivante : pourquoi la croissance des revenus individuels s’est-elle arrêtée à des taux rarement observés au Canada en dehors des grandes récessions ?

La réponse est claire : il existe une corrélation directe entre la productivité et les revenus des Canadiens.

De 1945 à 1975, le salaire hebdomadaire moyen réel a doublé au Canada. Ceci est dû en grande partie grâce à l’amélioration de la productivité. Au rythme actuel, il faudrait environ quatre siècles pour réaliser cet objectif.

La croissance des salaires a largement décéléré en raison d’un ralentissement de la productivité du travail. Après ajustement à l’inflation, la rémunération hebdomadaire moyenne n’a augmenté que de 1,6 % entre janvier 2015 et janvier 2024, soit moins de 0,2 % par an. Il s’agit d’un changement considérable par rapport au taux de croissance de plus de 1,5 % par an dont les travailleurs canadiens ont bénéficié au cours des deux décennies précédentes.

Le Canada enregistre des excédents commerciaux dans les secteurs de l’agriculture, du bois, des minéraux, du pétrole et du gaz. En revanche, ses résultats sont médiocres dans les industries plus avancées sur le plan technologique. C’est là que les économies avancées rivalisent et innovent. C’est aussi là que les gains de productivité peuvent progresser rapidement et que les salaires sont plus élevés.

Les industries de pointe sont des secteurs caractérisés par des investissements importants dans la R&D, des niveaux élevés d’intégration technologique et une main-d’œuvre qualifiée. Elles comprennent généralement des industries — telles que l’énergie, l’aérospatiale, la biotechnologie, les technologies de l’information, la fabrication de pointe et la robotique — qui stimulent l’innovation et la croissance économique grâce à des technologies et des processus de pointe.

Comme le montre l’indice Hamilton de l’Information Technology and Innovation Foundation, basée aux États-Unis, le Canada est à la traîne dans les industries de pointe, derrière le Mexique en matière de production totale et de parts de marché mondiales, et la performance relative du pays est en baisse. Cette situation est le résultat d’une politique économique floue qui n’a pas réussi à établir un lien entre la recherche, l’innovation et l’amélioration de la productivité dans des secteurs particuliers où le Canada a la possibilité de devenir un chef de file mondial.

La compétitivité dans les industries de pointe — telles que la biotechnologie, l’aérospatiale, l’énergie et les technologies propres, ainsi que la fabrication de pointe — revêt une importance cruciale pour les économies modernes. Ces industries stimulent l’innovation et la productivité, ce qui favorise la croissance économique et la création d’emplois bien rémunérés. Elles garantissent la compétitivité mondiale en gagnant des parts de marché importantes et en attirant les investissements directs étrangers. En outre, elles renforcent la sécurité nationale en préservant l’autonomie stratégique et la résilience. Ces secteurs contribuent également à des avantages sociaux tels que les progrès en matière de soins de santé et l’amélioration des infrastructures, ce qui, en fin de compte, améliore la qualité de vie.

La piètre performance de l’économie canadienne ne peut être imputée à la mondialisation. Elle est plutôt le résultat d’un déficit d’innovation.

Le Canada dispose d’atouts considérables qui restent inexploités en cette période de concurrence accrue : il possède le capital humain et les ressources naturelles qui peuvent alimenter l’innovation et la croissance économique.

Si le Canada n’est pas compétitif à grande échelle dans les industries de pointe, il restera une économie peu innovante et, par conséquent, sa compétitivité mondiale continuera de s’affaiblir. Pour réussir, le pays doit se concentrer sur l’innovation dans les secteurs où il dispose d’un avantage comparatif, tels que l’énergie, l’agriculture, les infrastructures et la biotechnologie.


Le Canada peut être fier, à juste titre, de ses champions mondiaux dans les industries de pointe, mais ils ne sont tout simplement pas assez nombreux pour maximiser le potentiel économique du pays. Et rien n’indique que cela puisse changer de sitôt.

L’économie est trop dépendante de la consommation et souffre d’un manque d’investissements qui la rend beaucoup moins productive qu’elle ne devrait l’être.

L’approche politique actuelle favorise la recherche de rente et les secteurs manufacturiers à faible valeur ajoutée. La politique industrielle de recherche de rente mine la productivité et la compétitivité en encourageant les entreprises à rechercher des aides publiques au lieu de se concentrer sur l’innovation. Dans des industries comme le secteur automobile, le gouvernement fédéral a accordé d’importantes subventions aux entreprises étrangères, privilégiant souvent les usines de montage ou d,assemblage au détriment de la conception et du développement de technologies.. Cette manière de concevoir la politique industrielle, principalement par le biais de subventions, investit souvent dans des industries à la recherche de rente, et attire par inadvertance davantage de chercheurs de rente.

Les pays qui parviennent à améliorer leur performance économique le font généralement en se concentrant sur des avantages sectoriels — par exemple l’électronique en Corée du Sud, la fabrication manufacturière de pointe en Allemagne, les services financiers et la biotechnologie à Singapour, la cybersécurité en Israël, les produits pharmaceutiques en Suisse.

En revanche, la politique industrielle du Canada est mal définie et inefficace, accordant des subventions à des entreprises de divers secteurs et régions sans stratégie claire et ciblée. Ce manque d’orientation a par conséquent limité la productivité.

Plutôt que de poursuivre une approche fragmentée de la politique d’innovation, le Canada doit changer de cap et adopter un plan à long terme qui tire parti des atouts considérables du pays.

Une politique plus efficace consisterait à adopter une architecture scientifique et technologique moderne, conçue pour commercialiser les meilleures idées, tout en encourageant les talents et en finançant la recherche fondamentale et appliquée.

Une telle politique permettrait de promouvoir les secteurs du Canada qui présentent le plus grand potentiel, tels que l’énergie et les technologies énergétiques, les technologies agricoles, les infrastructures de pointe et la biotechnologie.

Elle permettrait également de tirer parti des avantages historiques d’un système d’immigration hautement qualifié. À l’heure actuelle, en accordant trop d’importance aux demandes immédiates du marché du travail et aux emplois faiblement rémunérés, le Canada risque de compromettre les avantages à long terme de l’attraction de talents hautement qualifiés.

La croissance économique est également entravée par un cadre réglementaire trop complexe et inefficace qui crée une imprévisibilité considérable, et par des obstacles au commerce intérieur qui étouffent les investissements et les capitaux. De plus, en privilégiant les petites entreprises et non les grandes, on limite le potentiel d’investissement à grande échelle des entreprises, y compris en matière de R&D.

Le pays perd du terrain en matière de compétitivité fiscale en raison de l’augmentation des impôts sur les sociétés et les particuliers, ce qui décourage les investissements productifs à long terme.

Le Canada a besoin d’un meilleur modèle de croissance.

ALIMENTER LES MOTEURS DE CROISSANCE

Le Canada dispose d’une occasion générationnelle de stimuler la productivité, les salaires et le niveau de vie pour les années à venir.

Il existe cinq pistons qui peuvent alimenter les moteurs de croissance économique :

  1. Devenir un chef de file mondial en matière de sécurité énergétique. Le Canada peut tirer parti de ses atouts en cette période d’incertitude géopolitique accrue et aider le monde à passer à une économie à faibles émissions de carbone. Le pays dispose de ressources naturelles abondantes et exploitées de manière responsable, d’une longueur d’avance dans le domaine de l’énergie nucléaire et de tous les éléments de la chaîne d’approvisionnement, ainsi que d’une possibilité réelle — mais pas indéfinie — dans le domaine des minéraux critiques.
  2. Tirer parti des atouts du Canada. La population, les capitaux et les idées du Canada peuvent faire du pays un acteur des principales industries de pointe — les prochaines frontières technologiques sur lesquelles les économies avancées se livreront une concurrence intense au cours des prochaines décennies. Le Canada devrait concevoir, et non assembler, les prochaines vagues de produits et de services dans les domaines de l’agriculture, de l’énergie, des infrastructures, des soins de santé, de l’informatique, de la microélectronique, de la biofabrication et de l’aérospatiale. L’innovation sera ainsi au cœur de la prospérité économique du pays.
  3. Supprimer les obstacles internes à la croissance. Le Canada doit cesser de se mettre des bâtons dans les roues en corrigeant un cadre réglementaire défaillant et en supprimant les obstacles au commerce intérieur. La réforme du processus réglementaire de délivrance des permis pour les projets d’énergie et d’infrastructure doit devenir une priorité urgente. Il est essentiel de construire les actifs physiques et la richesse qui rendront le pays plus prospère : produire plus d’électricité pour décarboniser et construire des projets de production d’énergie, y compris dans les domaines à fort potentiel tels que l’énergie nucléaire et géothermique.
  4. Élaborer un plan d’innovation coordonné. Le Canada peut choisir le pragmatisme économique plutôt que l’idéologie et se montrer stratégique dans l’utilisation des investissements publics. Les institutions doivent favoriser la croissance économique et les gouvernements doivent rejeter à la fois la politique industrielle axée sur la recherche de rente et la naïveté du marché libre. La planification économique pilotée par l’État des années 1970 et l’économie de l’offre des années 1980 ne sont pas la solution. Ces deux expériences ont échoué.
  5. S’associer au secteur privé. Le Canada peut choisir de mettre en place les partenariats public-privé nécessaires dans les industries de pointe pour stimuler l’innovation et la productivité. Le changement climatique et les impératifs de sécurité nationale ne disparaîtront pas. Le pays doit trouver le bon équilibre entre une intervention gouvernementale ciblée et le dynamisme du marché.

Mettre en place des assises solides

La réindustrialisation réintroduit le débat entre les capacités de production d’une économie et les prix à la consommation (laisser le marché produire un bien ou un service au moindre coût). La réindustrialisation vise à renforcer les capacités de production d’une économie, en mettant l’accent sur les capacités dynamiques telles que l’innovation, le progrès technologique et le développement d’une main-d’œuvre qualifiée. Cette approche vise à renforcer la sécurité économique et la compétitivité, et stimule la croissance économique en promouvant les secteurs de la fabrication et des services à forte valeur ajoutée.

En économie, une externalité positive est un effet secondaire bénéfique d’une activité économique qui profite à des tiers non liés, comme les gains sociaux résultant des progrès technologiques et médicaux. Les investissements dans la R&D, le développement des compétences et la conception des technologies procurent ces avantages, mais les entreprises sont confrontées à des risques et des coûts élevés. Pour compenser ces risques, une intervention ciblée des pouvoirs publics peut garantir des gains économiques généraux auxquels les entreprises individuelles ne donneraient peut-être pas la priorité. Les États-Unis utilisent ce modèle depuis des années avec l’approche DARPA, où le gouvernement finance des projets de recherche à haut risque et à haut rendement qui stimulent l’innovation technologique et la croissance économique, favorisant ainsi des avancées que les entreprises privées ne poursuivraient peut-être pas de manière indépendante.

Le Canada ne peut remédier à sa perte de compétitivité par le protectionnisme. L’imposition de tarifs douaniers entraînerait une perte supplémentaire de part de marché mondial.

En outre, des limitations importantes compliquent le rapatriement de la production dans des secteurs tels que l’automobile, où les décisions sont orientées par la réduction des coûts, l’expansion du marché et l’évolution des cycles de produits. En fin de compte, ces subventions énormes aboutissent à ce qui est essentiellement un « arbitrage » des coûts de main-d’œuvre.

Le seul domaine où l’arbitrage des coûts de main-d’œuvre est impossible est celui de la conception et du développement de la technologie. Contrairement à l’industrie manufacturière ou à d’autres industries à forte intensité de main-d’œuvre, la conception et le développement technologique ne peuvent pas être facilement externalisés à des marchés du travail à faible coût ou subventionnés afin de réaliser des économies. En effet, la conception et le développement de la technologie requièrent des compétences hautement spécialisées, de l’expertise et souvent un environnement de collaboration qui ne sont pas aussi facilement reproductibles dans les régions où le coût de la main-d’œuvre est moins élevé. La conception et le développement de technologies de haute qualité dépendent de l’accès à des talents de premier plan, à une recherche de pointe et à des écosystèmes d’innovation solides.

Il est évident que l’économie politique du moment dicte en partie les choix de politique industrielle. Le marché ne garantira pas à lui seul l’approvisionnement en biens stratégiques liés à la sécurité nationale. Les semi-conducteurs (puces électroniques) en sont un bon exemple. Aujourd’hui, nous sommes confrontés à d’importantes conséquences géopolitiques et économiques du fait d’avoir permis que 60% de la production mondiale de semi-conducteurs — un atout indispensable pour les économies nationales — soit concentrée entre les mains d’une seule entreprise à Taïwan, TSMC. De même, il est peu probable que les forces du marché permettent à elles seules de réaliser la décarbonation rapide de l’économie dont nous avons besoin. C’est pourquoi le gouvernement doit mettre en œuvre des incitations stratégiques et ciblées pour accélérer l’investissement privé dans les secteurs clés.


Au-delà des enjeux cruciaux que constituent la sécurité nationale et le changement climatique, le Canada est confronté à des obstacles croissants sur le plan du déploiement du capital privé. Au cours des dernières décennies, ces obstacles se sont intensifiés en raison d’un environnement réglementaire défaillant, marqué par l’imprévisibilité et l’incertitude, en particulier pour les grands projets. En outre, les investissements dans les infrastructures stratégiques telles que la production et la distribution d’énergie et le transport de marchandises dans les ports ont été insuffisants.

Le régime fiscal de moins en moins compétitif pour les investisseurs et les entreprises, associé à une politique industrielle inefficace qui soutient les secteurs non compétitifs, ne fait qu’aggraver le problème. Les obstacles internes au commerce restent très problématiques et entravent la croissance économique.

Les investissements des entreprises alimentent les gains de productivité et, sans réformes importantes visant à rendre les systèmes réglementaires et fiscaux plus efficaces et plus compétitifs, il sera difficile de faire bouger les choses.

Les récents changements apportés au régime fiscal canadien le rendent moins compétitif lorsqu’il s’agit d’encourager les investissements. Selon l’OCDE, si l’on tient compte de l’impôt sur les dividendes de sociétés appliqué au revenu des particuliers, l’impôt total sur les bénéfices distribués par les entreprises canadiennes est le plus élevé parmi les pays du G7.

La compétitivité fiscale est un élément clé pour retenir les talents au Canada et stimuler la prospérité économique. Un plan détaillé de réforme fiscale dépasse le cadre du présent document, mais il est primordial que la politique fiscale soit utilisée comme un outil pour favoriser l’innovation et la productivité. Cela signifie qu’il faut utiliser les incitations fiscales pour encourager les entreprises à investir dans la machinerie, l’équipement, la R&D et la PI.

Le Programme de la recherche scientifique et le développement expérimental (RS&DE), conçu pour inciter les entreprises à mener des activités de recherche et développement, présente de graves lacunes et doit être réformé. Le budget de 2018 a annoncé l’introduction de mesures d’amortissement accéléré, permettant aux entreprises d’amortir immédiatement le coût intégral de la machinerie et de l’équipement utilisés dans la fabrication et la transformation, ainsi que des investissements dans l’énergie propre, afin de stimuler l’investissement et la croissance économique. Le problème est que ces changements sont temporaires et qu’à partir de 2024, ils seront progressivement supprimés et complètement éliminés après 2027. Cela se traduira par une augmentation considérable des impôts sur les nouveaux investissements des entreprises.

Innovation, productivité et compétitivité

Même si les assises économiques sont mieux établies, elles ne suffiront pas nécessairement à insuffler un dynamisme économique.

Le ralentissement économique des dernières décennies ne doit pas se poursuivre. Pour changer de cap, l’économie canadienne doit devenir plus axée sur la technologie.

À cet égard, nous pouvons nous inspirer de l’économie schumpétérienne, nommée d’après feu l’économiste Joseph Schumpeter, qui met l’accent sur le rôle de l’innovation, de l’esprit d’entreprise et du changement technologique en tant que principaux moteurs de la croissance économique.

Les théories de Schumpeter sont résumées dans son concept de « destruction créatrice », qui décrit comment les nouvelles innovations remplacent les technologies et les modèles d’entreprise dépassés, stimulant ainsi le progrès économique.

L’évolution du modèle de la croissance exogène de Robert Solow vers la théorie de la croissance endogène de Paul Romer représente un changement important dans la compréhension de la croissance économique. Le modèle de Solow, introduit dans les années 1950, mettait l’accent sur l’accumulation du capital et le travail comme principaux moteurs de croissance, le progrès technologique étant considéré comme un facteur externe et inexpliqué nécessaire pour soutenir la croissance à long terme.

En revanche, la théorie de la croissance endogène de Paul Romer, élaborée à la fin des années 1980 et conforme au cadre schumpétérien, a placé l’innovation technologique et la création de connaissances au cœur du modèle, en affirmant que la croissance économique est principalement due à des facteurs internes à l’économie, tels que l’investissement en capital humain, la R&D et les politiques favorisant l’innovation. Ce changement a souligné que la croissance peut être soutenue par une innovation continue et des améliorations de la productivité.

Il est important de comprendre l’interaction entre l’innovation, la productivité et la compétitivité économique. L’innovation entraîne des gains de productivité qui, à leur tour, renforcent la compétitivité économique. Les nouvelles technologies et les nouveaux processus améliorent la productivité et créent de nouvelles industries. La croissance économique résulte d’innovations de produits (nouveaux biens et services), d’innovations de procédés (nouvelles façons de produire des biens et des services de manière plus efficace) et d’innovations de modèles d’entreprise (par exemple, Amazon transformant le commerce de détail par le biais du commerce électronique).

Les pressions concurrentielles favorisent l’innovation, créant ainsi un cycle d’amélioration et de croissance continues.

L’innovation et l’adoption de la technologie sont toutes deux essentielles au progrès économique. L’innovation stimule la création de nouvelles technologies et solutions, tandis que l’adoption garantit que ces innovations ont une incidence généralisée et significative. L’équilibre entre les deux est essentiel pour favoriser le développement durable et améliorer la qualité de vie.

L’application moderne de la science et de la technologie est la nouvelle frontière de la compétitivité économique. À l’avenir, les principaux moteurs de la compétitivité économique mondiale seront un ensemble d’innovations technologiques, de développement du capital humain, d’écosystèmes d’innovation solides et d’infrastructures de pointe. Les pays et les entreprises qui sauront exploiter efficacement ces moteurs et s’adapter à l’évolution de la dynamique mondiale seront les mieux placés pour prospérer dans l’économie mondiale compétitive de demain.

Comment le Canada peut s’imposer dans les industries de pointe

En fin de compte, le niveau de vie des Canadiens dépend de la capacité des entreprises canadiennes à vendre de manière compétitive des biens et des services aux autres pays, tout en payant des salaires plus élevés à leurs employés et en apportant des revenus importants aux gouvernements.

En termes simples, si le Canada ne produit pas suffisamment de biens et de services que les personnes à I’étranger veulent acheter, il lui sera plus difficile de maintenir un niveau de vie élevé et d’être compétitif à l’échelle mondiale.

La crise financière mondiale de 2008 a entraîné un grave ralentissement du commerce international. Les exportations du Canada ont fortement chuté et le pays a connu des déficits commerciaux en raison de la contraction de l’économie mondiale et de la baisse des prix des produits de base.

Le pétrole et le gaz ont joué un rôle crucial dans l’atténuation des déficits commerciaux du Canada. Sans ces exportations, le Canada aurait accusé des déficits commerciaux beaucoup plus importants, surtout lors des chutes des prix des produits de base et des ralentissements économiques.

Le Canada doit améliorer ses performances dans les industries de pointe, c’est-à-dire dans les secteurs où les principales économies sont à la fois compétitives et innovantes. Cet impératif s’étend au-delà de la fabrication de pointe pour inclure les services, d’autant plus que l’économie est de plus en plus alimentée par des biens immatériels tels que les données et la PI.

Les concurrents du Canada ne cessent de progresser, et il est donc essentiel que les décideurs politiques se concentrent sur l’efficacité des interventions gouvernementales et favorisent les partenariats public-privé qui permettront d’assurer la prospérité économique des générations futures.

La Information Technology and Innovation Foundation (ITIF), un groupe de réflexion américain, a soutenu à juste titre que les « capacités dynamiques » des entreprises sont essentielles pour stimuler la productivité :

« Les marchés ne conçoivent pas et ne produisent pas de voitures, ce sont les constructeurs automobiles qui le font. Les marchés n’ont pas inventé et commercialisé la biotechnologie ; ce sont les chercheurs universitaires et les entrepreneurs qui l’ont fait… Ce sont les capacités des entreprises qui permettent de réaliser ce que la société demande et ce dont elle a besoin : des augmentations rapides et importantes de la productivité, de l’innovation et de la compétitivité. C’est pourquoi une approche fondée sur les capacités est nécessaire. Mais il doit s’agir d’une approche dynamique des capacités, car les résultats économiques nécessaires à la société sont de nature dynamique. De nouvelles entreprises. De nouveaux produits. De nouveaux modèles d’entreprise. De nouveaux processus de production ».


La bonne nouvelle pour le Canada, c’est que d’autres pays ont réussi : Grâce au modèle d’innovation de la DARPA, les États-Unis sont une puissance technologique. Les Pays-Bas sont devenus une superpuissance agricole grâce à des investissements ciblés dans la R&D et l’innovation technologique. Taïwan a mis en place une feuille de route en matière d’innovation technologique qui lui a permis de dominer la conception et la production de semi-conducteurs sur les marchés mondiaux. L’Allemagne a joué un rôle de premier plan dans la transformation numérique de l’industrie manufacturière en adoptant des technologies telles que l’Internet des objets et l’IA.

Ce qui ressort clairement de tous ces exemples, c’est la nécessité d’une stratégie à long terme qui va au-delà d’un cycle électoral.    

Voici cinq mesures essentielles pour améliorer les performances du Canada dans les industries stratégiques de pointe :

1. En tant qu’économie de taille moyenne, le Canada doit être conscient des secteurs dans lesquels il peut être compétitif et disposer d’avantages comparatifs.

Pour mesurer le potentiel de l’avantage comparatif d’un pays dans un secteur particulier, il convient d’évaluer plusieurs mesures prospectives. Il s’agit notamment des tendances de croissance, des niveaux d’investissement, de la capacité d’innovation et de R&D, du développement du capital humain, des possibilités de marché, du paysage concurrentiel, de l’infrastructure et de l’environnement réglementaire. L’ensemble de ces mesures permet d’identifier les possibilités de croissance, la compétitivité future et la capacité à maintenir et à renforcer l’avantage comparatif au fil du temps.

Sur la base de ces mesures, le Canada dispose d’atouts, mais d’un potentiel inexploité dans les principaux secteurs de pointe.

Le Canada peut s’imposer dans le domaine de l’énergie et des technologies énergétiques grâce à ses atouts :

  • Des ressources énergétiques diversifiées : Le Canada est riche d’une variété de ressources énergétiques produites de manière responsable, notamment le pétrole, le gaz naturel, l’hydroélectricité, le nucléaire, l’éolien, le solaire et la biomasse. Cette diversité permet au Canada de maintenir un portefeuille énergétique équilibré et résilient.
  • L’énergie nucléaire : Chef de file mondial dans le domaine de la technologie nucléaire, le Canada dispose de vastes ressources en uranium, principalement situées en Saskatchewan, qui lui permettent de fournir du combustible à la fois pour la consommation nationale et pour l’exportation internationale. Alors que le Canada cherche à atteindre ses objectifs en matière d’énergie propre, les progrès de la technologie nucléaire, tels que les petits réacteurs modulaires (PRM), offrent de nouvelles possibilités.
  • L’innovation et l’application de stratégies de décarbonation : Le Canada a le potentiel de devenir un pionnier dans la réduction du méthane et le captage et le stockage du carbone.
  • Les énergies renouvelables : Le Canada dispose d’un énorme potentiel d’expansion de sa capacité en matière d’énergies renouvelables. Avec de vastes étendues de terres propices aux parcs éoliens et solaires, des côtes permettant d’exploiter l’énergie marémotrice, d’importantes ressources en biomasse et une énergie hydroélectrique bien établie, le Canada peut continuer à développer son secteur des énergies renouvelables pour répondre aux demandes futures et réduire les émissions de gaz à effet de serre.
  • Le gaz naturel : Le Canada dispose d’abondantes réserves de gaz naturel, qui peuvent servir de combustible de transition alors que le pays s’oriente vers un avenir énergétique plus durable.
  • L’énergie géothermique : Le Canada dispose d’un important potentiel d’énergie géothermique, en particulier dans des régions telles que la Colombie-Britannique et l’Alberta. Le développement de l’énergie géothermique peut constituer une source d’énergie fiable et durable, contribuant au bouquet énergétique du Canada.

Le Canada peut s’imposer dans le domaine des infrastructures de pointe :

Les infrastructures de pointe comprennent les systèmes de transport intelligents (trains à haute vitesse), les communications de pointe (réseaux 5G), les systèmes d’énergie durable (réseaux intelligents, solaire, éolien, hydro, nucléaire), la gestion de l’eau et des déchets, les infrastructures numériques (systèmes de cybersécurité, services infonuagiques), les infrastructures publiques (installations de soins de santé de pointe, télémédecine et systèmes d’information sanitaire).

Le secteur des infrastructures de pointe est prêt à croître, soutenu par des investissements substantiels dans les transports et la connectivité numérique. Les investissements dans les technologies et les solutions d’infrastructures durables stimulent l’innovation. L’intérêt mondial croissant pour les infrastructures durables et résilientes représente une occasion pour le Canada d’exporter son expertise et ses technologies dans ce domaine.

Le Canada peut s’imposer dans le domaine des technologies agricoles :

La forte demande mondiale pour les produits agricoles canadiens, notamment les céréales, le bétail et les cultures spécialisées, offre au secteur agricole canadien d’importants débouchés. L’abondance des terres arables, les ressources en eau douce et les conditions climatiques favorables du Canada renforcent encore son potentiel. Des avantages concurrentiels pour plusieurs produits agricoles, une infrastructure bien développée pour le transport et l’exportation, et des politiques de soutien à l’agriculture durable contribuent aux forces du secteur.

Le secteur a connu une croissance de la production et de la productivité, grâce à l’agriculture de précision et aux biotechnologies. On observe une hausse des investissements dans les technologies et les infrastructures agricoles, soutenus par une solide base de R&D dans les domaines de la génétique des cultures, de la lutte contre les ravageurs et des pratiques agricoles durables. Le Canada devrait tirer davantage parti de ses atouts, notamment dans les domaines de l’agriculture de précision, de la robotique et l’automatisation, de l’analyse des données et l’IA, de l’agriculture verticale et de l’agriculture d’intérieur.

Le Canada peut s’imposer dans le domaine des matériaux de pointe :

Le Canada dispose d’un potentiel important dans le domaine des matériaux de pointe grâce à sa base de ressources et à ses solides capacités de recherche. La croissance des industries nécessitant des matériaux de pointe, telles que l’aérospatiale, l’automobile et la construction, stimule la demande. Les investissements dans le développement et la commercialisation de matériaux de pointe, y compris les nanomatériaux et les composites, sont en hausse. La demande mondiale croissante de matériaux de pointe représente une occasion pour le Canada d’exporter des matériaux et des technologies de pointe. Grâce à la richesse de ses ressources naturelles en matières premières, à son avantage concurrentiel en matière d’exploitation minière et de traitement, et à son expertise en science des matériaux, le Canada fait bonne figure dans ce domaine.

Le Canada peut s’imposer dans le domaine de la biotechnologie :

S’appuyant sur la mise au point de vaccins à ARNm, la biotechnologie continuera à faire progresser la médecine personnalisée par le biais de tests génétiques, de la thérapie génique et de produits biopharmaceutiques. Elle pourrait conduire à des traitements plus ciblés pour des maladies telles que le cancer. Elle permettra d’améliorer le rendement des cultures et de mettre au point des plantes résistantes à la sécheresse.

Le secteur canadien de la biotechnologie présente un potentiel important grâce à une R&D robuste, à une main-d’œuvre qualifiée et à des investissements substantiels. La croissance des biotechnologies médicales, agricoles et environnementales est soutenue par de solides institutions de recherche.

2. La stratégie du Canada en matière de talents doit inclure l’immigration hautement qualifiée

Les économistes ont observé que les humains sont uniques parmi les espèces dans leur capacité à créer de nouvelles connaissances, et c’est cette accumulation de connaissances qui propulse la croissance économique.

L’éducation et les talents sont les pierres angulaires de la croissance économique, car ils favorisent l’innovation, augmentent la productivité et renforcent l’avantage concurrentiel d’un pays. Une main-d’œuvre bien formée et qualifiée stimule les avancées technologiques. Les investissements dans l’éducation et le développement des talents créent une main-d’œuvre qualifiée capable de soutenir et d’accélérer le développement économique, garantissant ainsi la prospérité et la résilience à long terme dans une économie mondiale.

Le développement des technologies de pointe est un projet hautement compétitif et orienté vers l’avenir. La Defense Advanced Research Projects Agency (DARPA) des États-Unis et la Fraunhofer-Gesellschaft allemande sont deux exemples internationaux de réussite dans ce domaine. Ces organisations encouragent les entreprises des secteurs essentiels à établir des objectifs technologiques à long terme au moyen de feuilles de route clairement définies qui présentent leur vision et leurs plans stratégiques pour des avancées technologiques essentielles.

La réalisation de ces objectifs repose sur des talents de R&D de calibre mondial, capables d’apporter des solutions novatrices à des défis industriels importants. Cela nécessite une stratégie globale en matière de talents axée sur les domaines STIM (sciences, technologie, ingénierie et mathématiques), notamment la création et l’expansion de programmes de formation aux compétences industrielles de pointe et de programmes d’excellence de troisième cycle dans les universités à forte intensité de recherche. Actuellement, la politique d’immigration du Canada semble trop axée sur la satisfaction des besoins immédiats du marché du travail, notamment en remédiant aux graves pénuries de main-d’œuvre peu qualifiée et faiblement rémunérée qui sont apparues depuis la pandémie dans des secteurs tels que l’hébergement et la restauration. La stratégie fédérale actuelle en matière d’immigration a augmenté l’offre de main-d’œuvre au Canada, mais elle s’est traduite par une forte augmentation du nombre de résidents temporaires.

Historiquement, le système d’immigration canadien a bien fonctionné grâce au système de points dans le cadre d’Entrée express pour évaluer les candidats. Il donne la priorité à ceux qui ont un niveau d’études supérieur, une expérience professionnelle, des compétences linguistiques et d’autres facteurs qui contribuent à leur contribution économique potentielle. Cette orientation économique garantit que le système accorde la priorité aux travailleurs qualifiés, aux professionnels et aux entrepreneurs, permettant ainsi aux nouveaux arrivants de contribuer positivement au marché du travail et à l’économie.

Une recommandation tirée d’un rapport récent de RBC est pertinente :

« Le gouvernement fédéral doit réactualiser ses politiques d’immigration afin de mettre plus stratégiquement l’accent sur les retombées pour les immigrants ainsi que sur les besoins structurels à long terme du marché du travail, tout en gardant à l’esprit la capacité des infrastructures, s’agissant de répondre aux besoins des nouveaux arrivants. Il est essentiel d’agir en ce sens pour maintenir la prospérité économique à long terme et préserver la qualité de vie élevée qui prévaut au Canada. »

Pour favoriser la croissance économique, il est essentiel de mettre en œuvre une politique d’immigration robuste. L’immigration économique stimule l’innovation et l’esprit d’entreprise, contribuant ainsi de manière importante au dynamisme économique. Une politique d’immigration bien structurée est nécessaire pour favoriser une économie plus dynamique et axée sur la technologie.

3. Le Canada a besoin d’une nouvelle architecture scientifique et technologique pour l’ère moderne afin de rivaliser dans les secteurs stratégiques

L’architecture scientifique et technologique (S&T) actuelle du Canada ne produit pas d’innovation au même rythme que les pays pairs. Les Américains, les Allemands, les Sud-Coréens, les Israéliens et les Néerlandais, pour n’en citer que quelques-uns, ont compris depuis longtemps la contribution fondamentale de leurs institutions publiques de R&D et l’importance de la coordination dans leurs écosystèmes.

Le Canada doit se concentrer sur la manière de transformer, par le biais de mécanismes et d’incitations, le capital intellectuel (R&D publique) en R&D privée et, en fin de compte, en innovation et en croissance économique. Pour ce faire, le pays doit créer et mettre en place des ponts et des institutions de collaboration entre les secteurs public et privé.

Cette approche est à la base du modèle ARPA aux États-Unis, qui a été appliqué avec succès dans des secteurs tels que la défense (DARPA), l’énergie (ARPA-E), la recherche biomédicale (BARDA) et, plus récemment, la santé (ARPA-H). Elle constitue également le fondement des instituts allemands Max Planck et Fraunhofer, du modèle français LabEx et du modèle de R&D public-privé aux Pays-Bas — un pays dont la taille équivaut à la moitié de celle du Nouveau-Brunswick et qui est pourtant le deuxième exportateur mondial de produits agricoles.

Le Canada a besoin d’une incarnation moderne de ce qui était autrefois les laboratoires d’entreprise dans ses industries innovantes — où la recherche industrielle menée en collaboration avec les gouvernements, les universités et les entreprises a donné lieu à une véritable innovation à grande échelle dans l’économie.

Une nouvelle agence pour les projets de recherche avancée permettrait de stimuler les percées technologiques et l’innovation, et de renforcer la compétitivité économique.

Dans une récente étude évaluant la politique industrielle américaine au cours des cinquante dernières années, le Peterson Institute for International Economics a déclaré :

« Le soutien à la R&D publique et privée a été de loin le mode de politique industrielle le plus efficace. L’une des raisons est la force des États-Unis, soutenus par de grandes universités, en matière d’efforts de recherche. Une autre raison est la tradition américaine qui consiste à donner une marge de manœuvre et un soutien aux scientifiques dans la poursuite d’un même objectif (missions). Une troisième raison pour la R&D publique est la pratique consistant à permettre aux entreprises privées de commercialiser les résultats, généralement avec des redevances modestes ou inexistantes pour le gouvernement ».

4. Les décideurs politiques doivent mieux comprendre les rentes économiques dans une économie de plus en plus immatérielle

Comme l’explique le rapport Une nouvelle étoile polaire, l’économie mondiale est de plus en plus alimentée par des biens immatériels, et les pays qui sauront les exploiter seront les plus compétitifs. Les biens immatériels comprennent des actifs tels que les logiciels, les brevets, les marques et le capital humain.

Dans une économie immatérielle, les droits de PI tels que les brevets, les droits d’auteur, les marques et les secrets commerciaux sont des sources cruciales de rentes économiques. Les entreprises qui détiennent des droits de PI précieux peuvent percevoir des rentes importantes en octroyant des licences à des tiers pour leurs inventions ou leurs créations, ce qui leur confère un avantage concurrentiel et la possibilité de dominer leur marché.

Les plateformes et les écosystèmes qui bénéficient d’effets de réseau — où la valeur du réseau augmente avec le nombre d’utilisateurs — sont également source de rentes économiques. Les plateformes de médias sociaux, les marchés en ligne et les écosystèmes de logiciels sont en mesure de devenir des acteurs dominants dans la capture de rentes en tirant parti de leurs vastes bassins d’utilisateurs et de leurs effets de réseau pour attirer les annonceurs, percevoir des redevances ou monétiser les données des utilisateurs. À l’ère numérique, les données sont devenues un actif précieux.

Les entreprises qui collectent et analysent de grands ensembles de données peuvent en tirer des rentes économiques grâce à des informations qui permettent de prendre des décisions commerciales, d’améliorer les produits ou d’enrichir l’expérience des clients. Les algorithmes et les analyses exclusives permettent également de générer des rentes économiques.

La valeur et les rentes économiques liées à la conception d’un iPhone dépassent de loin celles liées à son assemblage. La conception implique des activités à forte valeur ajoutée telles que la R&D, le développement de logiciels et la gestion de la marque, qui procurent d’importantes rentes économiques grâce à la propriété intellectuelle, au pouvoir de la marque et au contrôle de l’écosystème. En revanche, l’assemblage d’un iPhone implique des activités à faible valeur ajoutée, à forte intensité de main-d’œuvre, avec de minces marges bénéficiaires et des rentes économiques limitées. La capacité d’Apple à s’approprier une part substantielle de la valeur de l’iPhone grâce à l’innovation, à la force de la marque et aux technologies propriétaires souligne la disparité importante des rentes économiques entre la conception et l’assemblage d’un produit.

Si l’on prend l’exemple de l’industrie automobile, le Canada doit décider s’il veut jouer un rôle de premier plan dans la conception de la prochaine génération de batteries ou se contenter d’accorder des subventions aux entreprises étrangères pour qu’elles assemblent les produits. Quelle approche favorisera réellement l’innovation, la productivité et la compétitivité ?

La stratégie de la Californie qui privilégie le développement technologique, l’innovation et l’industrie manufacturière à forte valeur ajoutée a entraîné une plus grande prospérité économique, une plus grande richesse et des salaires plus élevés que celle du Michigan qui se concentre sur l’industrie manufacturière traditionnelle. Pour obtenir un succès semblable, le Canada devrait adopter une approche avant-gardiste qui favorise le progrès technologique et la production à haute valeur ajoutée.

5. 4) La politique d’innovation actuelle du Canada nécessite des réformes structurelles

La réforme de la politique d’innovation se heurte à quatre obstacles structurels :

  1. L’augmentation du PIB par habitant : Cet objectif est plus important que la création et le maintien d’emplois, car il reflète l’augmentation de la productivité et de l’efficacité économique, qui sont essentielles à l’amélioration du niveau de vie général. Cela nécessite une stratégie à long terme et une planification stratégique de la conception et du développement de la technologie pour les secteurs industriels de pointe.
  2. L’emprise politique sur la politique industrielle : La volonté politique de répartir les ressources financières entre tous les secteurs et toutes les régions n’est pas efficace compte tenu de la taille relativement petite du Canada. Elle ne produit pas le résultat escompté, à savoir une croissance économique supérieure, même à l’échelle régionale. Subventionner des entreprises dont les retombées économiques sont limitées s’avère nettement moins avantageux que de développer les talents et la force de la R&D dans les industries de pointe. En matière de propriété intellectuelle, le Canada ne protège pas la valeur de ses idées avec autant de vigueur que les pays concurrents.
  3. La sclérose académique et bureaucratique et les obstacles à l’accès : Le modèle actuel de financement de la S&T est dépassé et n’est pas adapté à l’échelle et à la portée des défis actuels : changement climatique, pandémies, innovation technologique et sécurité nationale. En général, les incitations financières des conseils subventionnaires au niveau universitaire n’encouragent pas la prise de risque et le développement de technologies performantes. Il n’y a pas ou très peu de recherche axée sur la résolution de problèmes industriels.
  4. Manque de coordination : Tous les organismes « d’innovation » sous la responsabilité du gouvernement fédéral — qu’il s’agisse de la Fondation canadienne pour l’innovation, de Mitacs, de la Banque de développement du Canada, d’Exportation et développement Canada, des agences de développement régional, des conseils subventionnaires ou du Conseil national de recherches — travaillent indépendamment les unes des autres. Leur incidence est limitée dans les domaines où ils sont le plus nécessaires, à savoir les industries stratégiques et de pointe.

Conclusion

La croissance économique par habitant n’est pas une fin en soi, c’est un moyen d’atteindre d’autres objectifs. Elle permet d’augmenter les salaires des travailleurs, d’élever le niveau de vie et de financer des programmes sociaux, y compris la prise en charge des personnes les plus vulnérables de notre société.

Mais nous ne pouvons pas redistribuer ce que nous ne produisons pas, et c’est pourquoi le Canada doit impérativement stimuler les moteurs de croissance.

Les décideurs politiques ne peuvent pas continuer à proposer des mesures sporadiques, provisoires, et inefficaces qui font pencher l’économie vers une augmentation de la consommation et une diminution de la production.

Plus important encore, la politique budgétaire doit être utilisée judicieusement pour stimuler la capacité de production dans les secteurs de pointe, et non pour fournir des subventions aux entreprises ou mener une politique industrielle axée sur la recherche de rente. Une architecture moderne de S&T, avec des investissements ciblés dans les talents, la R&D, l’innovation et l’adoption de la technologie dans les industries avancées sur le plan technologique, pourrait permettre de réaliser davantage de gains de productivité à un coût bien inférieur au montant actuellement consacré à des programmes et structures d’innovation à motivation politique.

Le Canada ne peut parvenir à la prospérité à coups d’emprunts publics. L’augmentation des déficits et de la dette entraînera forcément des réductions de programmes et des hausses d’impôts. Celles-ci devront être assumées par les générations futures, dont les gouvernements devront assurer le service d’une dette plus importante et plus lourde, au détriment de toutes les missions importantes de l’État.

Un véritable partenariat est nécessaire entre les secteurs public et privé pour favoriser la croissance économique. Les entreprises et les investisseurs doivent avoir confiance dans les fondamentaux macroéconomiques du Canada, y compris dans la simplicité et la prévisibilité de la réglementation. Les gouvernements doivent comprendre qu’ils ne peuvent pas microgérer une économie de marché et les entreprises doivent accepter que la nouvelle ère de l’économie politique est là pour de bon. La sécurité nationale et le changement climatique font désormais partie intégrante du cadre économique.

Enfin, il existe un lien direct entre l’innovation, la productivité et la compétitivité. À l’heure où les tensions géopolitiques et commerciales s’exacerbent, le choix de ne pas être compétitif à grande échelle dans les industries de pointe ne fera qu’aggraver les déficits d’innovation et de productivité. Il en résultera une baisse des salaires et du niveau de vie des travailleurs canadiens et de leurs familles. Les décideurs politiques doivent reconnaître que la conception et le développement de technologies dans les industries de pointe donnent toujours des résultats économiques supérieurs à ceux d’une stratégie économique de succursale à faible valeur ajoutée.

L’heure est grave et le progrès est un choix politique.

Le Canada est un pays aux possibilités et au potentiel économiques illimités. Il a une occasion générationnelle d’alimenter les moteurs de croissance au profit de tous les Canadiens.

Dix-sept recommandations concrètes au gouvernement fédéral pour alimenter les moteurs de croissance

Initiatives en matière de productivité :

  1. Placer la croissance du PIB par habitant et la productivité en tête des priorités du gouvernement et demander aux principales institutions fédérales — telles que le ministère des Finances et le Bureau du Conseil privé — d’en faire des éléments centraux de leur mandat.
  2. Lancer un examen interministériel complet de tous les programmes de politique industrielle afin d’évaluer leur efficacité à augmenter la productivité et la croissance du PIB par habitant.
  3. Entreprendre une révision complète du système fiscal afin de mieux encourager les investissements du secteur privé et de stimuler les salaires.
  4. Rationaliser le financement des infrastructures et créer un fonds d’infrastructure de pointe axé sur des projets d’amélioration de la productivité tels que les ports, la production d’électricité et l’adaptation au climat.
  5. Mettre en place un programme national de recyclage d’actifs, en s’inspirant du modèle australien, afin d’identifier et de privatiser les actifs publics qui s’y prêtent. Les recettes devraient être réinvesties de manière stratégique dans des projets d’infrastructure hautement prioritaires afin de stimuler la croissance économique. Ce programme devrait garantir la transparence et un engagement solide des parties prenantes à tous les niveaux, préserver l’intérêt public et maintenir la qualité des services.
  6. Mettre en œuvre un processus fédéral-provincial harmonisé d’évaluation environnementale pour les projets d’importance stratégique nationale.
  7. Réformer le Programme de la recherche scientifique et du développement expérimental (RS&DE) afin d’offrir des taux préférentiels aux secteurs à forte concentration de R&D et de fournir des incitatifs continus aux entreprises innovantes pour qu’elles investissent dans la R&D à long terme.

Être compétitif dans les industries de pointe :

  1. Effectuer des analyses industrielles complètes et développer une stratégie d’innovation à long terme pour les industries de pointe où le Canada dispose d’un avantage comparatif, comme l’énergie et les technologies énergétiques, les technologies agricoles, les infrastructures de pointe et la biotechnologie. Le gouvernement devrait procéder à une analyse concurrentielle détaillée de ces industries.
  2. Pour chaque secteur ciblé, élaborer une feuille de route décennale de partenariat public-privé axée sur les talents, la R&D et la conception, le développement et l’adoption de technologies. Mettre en œuvre des stratégies précises adaptées aux besoins de chaque secteur critique.
  3. Veiller à ce que l’ensemble des politiques, programmes et pratiques du gouvernement fédéral soient stratégiquement alignés pour soutenir et améliorer l’innovation, la productivité et la compétitivité du Canada dans ces secteurs essentiels.

Architecture et développement de la science et de la technologie (S&T) :

  1. Créer une agence canadienne pour les projets de recherche avancée (CARPA) sur le modèle de l’ARPA américaine, avec des volets consacrés à l’énergie, à la technologie agricole, à la biotechnologie et à l’infrastructure de pointe. Cette agence devrait faire avancer et commercialiser la recherche essentielle aux capacités industrielles de pointe du Canada, s’assurer que la recherche est stratégiquement alignée sur les défis industriels des industries canadiennes et établir un cadre d’approvisionnement spécialisé adapté à la mission de la CARPA qui consiste à encourager la R&D à haut risque et à haut rendement. Cette fonction d’approvisionnement spécialisée devrait se concentrer sur l’acquisition de technologies et de produits innovants qui résultent des projets soutenus par la CARPA, assurant ainsi une transition de l’innovation à l’application sur le marché.
  2. Transformer des institutions clés comme le ministère de l’Innovation, de la Science et du Développement économique et le Conseil national de recherches (CNRC) en organismes de S&T de pointe. Cela devrait impliquer une rationalisation importante des structures organisationnelles afin de se concentrer sur l’innovation technologique et d’améliorer la collaboration avec l’industrie.
  3. Mettre en place un mécanisme de coordination robuste qui harmonise et intègre les efforts d’entités telles que la Fondation canadienne pour l’innovation, Mitacs, la Banque de développement du Canada, Exportation et développement Canada, les agences de développement régional, les conseils subventionnaires et le CNRC. En veillant à ce que ces organismes fonctionnent en synergie dans un cadre central, l’efficacité des efforts d’innovation du Canada dans les secteurs clés sera renforcée.
  4. Remplacer le Bureau de la Conseillère scientifique en chef par un nouveau bureau de la politique scientifique et technologique du Conseil privé, sur le modèle du Bureau de la politique scientifique et technologique de la Maison‑Blanche aux États-Unis.

Développement des talents :

  1. En collaboration avec les gouvernements provinciaux, soutenir les initiatives visant à maintenir et à renforcer le vivier de talents dans le domaine des STIM, notamment en développant les programmes d’études supérieures dans des domaines tels que la microélectronique, l’IA, l’ingénierie, l’informatique et la génomique.
  2. En collaboration avec les gouvernements provinciaux, élargir les programmes d’éducation et de formation pour inclure des compétences industrielles de pointe, en préparant les étudiants et les travailleurs à des rôles de fabrication modernes.
  3. Concevoir des politiques d’immigration qui donnent la priorité à la croissance économique à long terme plutôt qu’aux besoins en main-d’œuvre à court terme. Cette stratégie permettra de maintenir l’offre de talents hautement qualifiés, essentiels à la croissance de la productivité.

Remerciements
Nous remercions Sofia del Castillo, stagiaire du Conseil canadien des affaires et étudiante en économie à l’Université McGill, pour son aide et son soutien à la recherche lors de la rédaction de ce document.

Droits d’auteur
© Conseil canadien des affaires, 2024

Citation
Asselin, R. (2024, 5 septembre). Moteurs de croissance. Conseil canadien des affaires. thebusinesscouncil.ca/fr/rapport/moteurs-de-croissance

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Les opinions présentées dans ce rapport sont celles du Conseil canadien des affaires. Les opinions présentées dans ce rapport ne reflètent pas nécessairement le point de vue des membres individuels du Conseil canadien des affaires et ne doivent donc pas être attribuées à un ou plusieurs de ces members.