Permettre une réforme de la fiscalité internationale

Lettre à la vice-première ministre et ministre des finances Chrystia Freeland concernant la mise en œuvre de la taxe sur les services numériques du Canada.

Chère vice-première ministre,

Pour faire suite à notre lettre du 15 février 2023, je vous écris au nom du Conseil canadien des affaires afin de vous faire part de nos préoccupations quant à la décision du gouvernement d’aller de l’avant avec l’application de la taxe unilatérale sur les services numériques (TSN) du Canada, en contravention avec l’accord multinational conclu lors des pourparlers de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) qui se sont déroulés cette semaine à Paris.

Comme nous l’avons déjà souligné, l’imposition unilatérale d’une TSN exposerait le Canada à des représailles de la part de son principal partenaire commercial et allié, les États-Unis. Plusieurs hauts fonctionnaires américains ont clairement indiqué que si le Canada imposait sa TSN unilatéralement, en dehors d’un accord-cadre multinational, ils demanderaient un règlement des différends dans le cadre de l’accord Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM).

Katherine Tai, représentante américaine au commerce, a évoqué la TSN avec la ministre du commerce international, Mary Ng, en marge de la troisième réunion de la commission de libre-échange de l’ACEUM, qui s’est tenue à Cancún la semaine dernière. Ignorer les appels répétés des hauts fonctionnaires de l’administration Biden et du Congrès — démocrates et républicains confondus — revient à risquer des représailles et à compromettre la révision de l’ACEUM en 2026.

Comme nous l’avons indiqué dans notre lettre précédente, en raison de la disposition rétroactive de votre loi d’habilitation de la TSN, un retard d’un ou deux ans dans sa mise en œuvre ne doit pas avoir de coût financier. Le Canada conservera alors toutes ses options. Toutefois, si les négociations de l’OCDE aboutissent, le Canada n’aura pas à imposer une TSN unilatérale ; vous avez clairement indiqué que c’était votre préférence depuis le tout début.

La seule ligne de conduite qui expose le Canada à des risques coûteux, comme nous l’avons signalé, est d’aller de l’avant avec la date limite acrimonieuse et arbitraire de janvier 2024. C’est le scénario que le Canada doit éviter. Le Canada ne devrait pas imposer une TSN unilatérale aux entreprises étrangères ou nationales avant que le processus de l’OCDE n’ait pu suivre son cours. Tous les autres pays de l’OCDE sont d’accord.

Étant donné que le Canada se prépare à accueillir le prochain Sommet des leaders nord-américains, soit plus tard cette année, soit en janvier 2024, la mise en œuvre de la TSN à ce moment-là pourrait nuire à cette procédure. Cette date coïnciderait également avec le début du cycle électoral américain, une période au cours de laquelle des irritants transfrontaliers tels que la TSN peuvent être dangereusement politisés par candidats à l’élection.

Pour ces raisons, nous vous demandons avec insistance de reconsidérer votre décision.

Je vous prie d’agréer, Madame la Vice-première ministre, l’expression de mes sentiments distingués.

Sincerement,

Goldy Hyder

c.c. L’honorable Mary Ng, C.P., députée
Ministre du Commerce international, de la Promotion des exportations, de la Petite entreprise et du Développement économique
Affaires mondiales Canada

M. Rob Stewart
Sous-ministre du Commerce international
Affaires mondiales Canada

M. Nick Leswick
Sous-ministre des Finances par intérim
Finances Canada