Ne taxer pas le succès en faisant payer davantage les grands employeurs

Comme publié dans le Financial Post

Le rôle du gouvernement ne devrait pas être de créer des emplois, mais de mettre en place les conditions économiques permettant aux entreprises de créer un nombre croissant d’emplois stables, sûrs et bien rémunérés pour les Canadiens. Plus une entreprise canadienne emploie de travailleurs, plus elle contribue à l’économie canadienne dans son ensemble.

Pourquoi, alors, certains politiciens prétendent-ils défendre les travailleurs canadiens tout en condamnant les entreprises canadiennes qui emploient le plus grand nombre d’entre eux ? Comment ces élus, de toute allégeance politique, peuvent-ils concilier la vénération des travailleurs et le dénigrement des entreprises pour lesquelles ils travaillent ?

Selon Statistique Canada, les grandes entreprises canadiennes — définies comme celles qui comptent 500 travailleurs ou plus — employaient 4,4 millions de Canadiens, soit 36 % de la main-d’œuvre du secteur privé en 2022. Pourtant, ces chiffres ne donnent pas une image complète de nos plus grands employeurs. Les plus grandes entreprises du Canada emploient chacune des dizaines de milliers de travailleurs canadiens, certaines d’entre elles employant plus de 100 000 personnes dans tout le pays.

Même ces chiffres sous-estiment le nombre réel de travailleurs dont les emplois sont soutenus par les plus grands employeurs du Canada, car ils ne tiennent pas compte des millions de personnes qui travaillent pour les petites et moyennes entreprises qui font partie de leurs chaînes de valeur et d’approvisionnement intégrées.

N’oublions pas non plus le nombre de personnes que les grandes entreprises continuent d’embaucher. Certains des plus grands employeurs du pays ont prévu d’embaucher des centaines, voire des milliers, de nouveaux travailleurs au Canada rien que cette année.

Parmi les plus grands employeurs du Canada, on trouve des entreprises qui exercent leurs activités dans des secteurs aussi divers que le commerce de détail, le transport, la fabrication, le génie de construction, la banque, les services financiers, les télécommunications, les ressources naturelles et l’énergie. Dans chacun de ces secteurs, on trouve de nombreux grands employeurs qui se font une concurrence active, à la fois au pays et à l’étranger.

Sont-ils assez nombreux ? Commençons par reconnaître qu’il n’existe aucun consensus économique mondial sur le marché libre qui prescrive le nombre exact de banques, de chaînes d’épiceries, de compagnies aériennes ou de sociétés de télécommunications qu’un pays de 41 millions d’habitants devrait avoir. Dans une économie capitaliste, le nombre sera celui que le marché peut supporter.

Ici, au Canada, il n’y a aucune restriction sur le nombre de grandes entreprises, financées par des investisseurs canadiens, qui peuvent être actives dans la plupart des secteurs. S’il existe un argument commercial, par exemple lorsqu’un segment de marché donné est mal desservi, les entrepreneurs peuvent lancer de nouveaux concurrents et accroître leurs activités ou développer des technologies de rupture pour bouleverser le statu quo.

Si toutes les petites et moyennes entreprises ne souhaitent pas devenir l’un des plus grands employeurs du Canada, la quasi-totalité des plus grands employeurs du pays a d’abord été des petites entreprises. Nous devrions encourager les petites entreprises à voir grand et à se développer pour devenir des sociétés concurrentielles à l’échelle internationale. Au lieu de cela, le discours politique décourage l’ambition, l’innovation et la concurrence en établissant une discrimination en fonction de la taille.

Si les conditions économiques sont favorables, y compris des régimes fiscaux et réglementaires compétitifs à l’échelle mondiale, le marché canadien pourrait se développer pour soutenir un nombre toujours croissant de grandes entreprises locales capables de se concurrencer ouvertement et équitablement, tant au Canada qu’à l’étranger.

Malheureusement, les politiques économiques actuelles du Canada n’adhèrent pas à ce type de principes de libre marché. Au lieu de faire croître l’économie, les décisions du gouvernement fédéral ont pour effet de réduire la taille des entreprises canadiennes par la combinaison d’impôts plus élevés, de lourdeurs réglementaires et de changements capricieux dans les lois sur la concurrence du pays.

Ces politiques du type « grand c’est mauvais » dissuadent les entreprises d’investir plus qu’elles ne les attirent. Les employeurs du secteur privé du monde entier n’investiront pas et ne resteront pas sur des marchés où le gouvernement national intervient activement pour plafonner les profits ou réduire leur part de marché.

En outre, ils n’investiront pas et ne resteront pas sur des marchés où les gouvernements inventent et exigent de nouveaux impôts qui s’ajoutent aux impôts déjà en place — y compris des surtaxes sur les « profits excédentaires ». Il ne s’agit pas de libre entreprise, mais d’un gouvernement qui impose un plafond arbitraire à la réussite.

Si le gouvernement plafonne les profits en imposant un impôt supplémentaire ou une surtaxe sur les profits après impôt — c’est-à-dire après que les entreprises ont déjà payé leurs employés et leur impôt sur les sociétés — il s’agira d’un autre clou dans le cercueil pour les investissements des entreprises au Canada.

Soyons clairs : le gouvernement fédéral a expressément exclu de limiter la part de marché des petites et moyennes entreprises ou d’imposer leurs profits au-delà d’un certain pourcentage. Ces quotas sont réservés aux plus grands employeurs du Canada, ceux qui emploient le plus de travailleurs.

Tout politicien qui prétend soutenir les travailleurs ne devrait pas s’en prendre aux plus grands employeurs du Canada et aux plus de 4,4 millions de Canadiens qu’ils emploient. Porter préjudice à ces travailleurs en fonction de la taille de l’entreprise pour laquelle ils travaillent ne relève pas de la libre entreprise, mais d’une intervention futile.

Suggérer que nous pouvons promouvoir les travailleurs et protéger leurs salaires en demandant au gouvernement de réduire la part de marché et de plafonner les profits des employeurs qui les rémunèrent va à l’encontre du bon sens. Les entreprises moins performantes et moins rentables emploient moins de travailleurs canadiens.